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Conférences 1999 |
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FRATERNITE, vision
de l'autre partie du monde: L'Extrême-Orient
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"Premier
né, d’une multitude de frère. " Romains. 8, 29
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Diné
débat
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Presque par instinct, les hommes aspirent vers une fraternité qui les unit comme issus d’une même famille. Reconnaître l’autre comme son propre frère sinon comme son prochain est le sentiment profond de l’homme. C’est son besoin. Chacun se positionne là où il est. C’est la géo-relation . Elle est plus importante que les liens du sang. " On vend la parenté éloignée pour acheter le proche voisinage. " Ici, rien ne joue encore au plan religieux. L’autre, l’étranger qui vient d’ailleurs, est comme la dimension qui manque pour être au large. La différence chez l’autre n’est-elle pas la partie qu’on n’a pas encore et qu’on aimerait bien avoir ? L’autre est comme la brèche sur les frontières qu’on n’a pas l’habitude , ni la possibilité de franchir . Cette aspiration populaire permet des réflexions plus approfondies sur l’homme qu’on trouve dans la conception de l’homme des " Trois Religions ", Tam-Giao, de l’Extrême-Orient. Confucianisme, Taoïsme, et Bouddhisme, chacune reconnaît que elle trouve son complément dans l’autre. Nous avons ici une indication de premier ordre sur la fraternité universelle. " Bôn-bê giai huynh-dê ". Les quatre océans sont d’une même fraternité, professent les confucéens depuis toujours. L’homme est l’une des trois puissances de l’univers: le ciel, la terre et l’homme. L’homme est originellement bon. " L’homme " est synonyme de la " Bonté " ou l’humanité: une des cinq vertus intégrantes qui façonnent l’homme : Nhân, Nghia, Lê, Tri, Tin : Bonté, Gratitude, Courtoisie et Confiance. Ce sont des vertus qui fondent les relations humaines et, en premier lieu, servent de base à la vie en famille, comme veut dire le mot " fraternité " dont la racine vient du mot " frère ". Toute la vie de l’homme doit avoir comme référence les relations qu’on entretient au sein d’une famille. Une double trilogie de vertus vient compléter le quintuple lien qui fait l’homme confucéen. La première appartient à la gouvernante du foyer, la femme. " Tai gia tong phu, Xuât gia tong phu, Phu tu tong tu. " Au foyer, mon père est ma référence, hors du foyer, mariée, ce sera mon mari, le mari mort, ce sera mon fils. La seconde trilogie concerne l’homme social: Tu-Thân, Tê-gia, Binh thiên-Ha. Maîtriser soi-même, gérer sa famille, pacifier le monde. Un disciple de Confucius, Mencius, cherche à élargir ces liens à et les appliquer à l’humanité toute entière. Et c’est la fraternité universelle dont le fondement est la piété filiale, le culte des ancêtres. Le Centre d’où rayonne l’universalité est, bien sûr, le Royaume du Centre, " Trung-Quôc ". Le Taoïsme vient donner ensuite à l’universalité confucéenne la dimension métaphysique. Au commencement est le Tao, la Voie. " La Voie est comme un bol vide que nul usage ne comble. Un sans-fond dont toute chose a tiré son origine. La Voie produit le Un. Le Un produit le deux. Le Deux produit Trois. Trois produit les Dix Mille êtres. Les dix Mille êtres s’adossent au Yin, serrant sur leur poitrine le Yang. L’Harmonie naît au vide des souffles médians. " Le Bouddhisme complète cette saga orientale par une analyse radicale de l’homme. Il est fait d’un amalgame de désirs et de passions. Sa conscience n’est qu’un feu follet qui le brûle et les autres avec. Il faut retirer tout combustible pour éteindre le feu ou l’illusion et atteindre la sérénité du non-conditionné ou le nirvana. Une fois atteint le vide, l’homme éveillé, Bouddha, peut s’ouvrir aux autres par compassion de leur état de conditionnés, ballotés par les changements des choses. La bouddhéité est à l’intérieur de tout homme. La réincarnation se fait au-delà de toutes frontières de races et de cultures... Par défaut de révélation, la contribution du Tam-Giao, les Trois Religions, donne ainsi à l’homme oriental la disponibilité, la tolérance, l’accueil, des éléments pour construire la fraternité entre les hommes Denis LUONG |
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