|
Je n’ai pas assisté à la réunion
du 23 Février , au cours de laquelle le Père Ela a fait
un exposé sur la situation africaine. A lire le texte publié
dans le dernier numéro de Germinal, je ne regrette pas mon abstention
. Se faire interpeller collectivement , en tant que Chrétien
et en tant que Français, d’une manière aussi peu objective
est navrant. Le discours reprend des arguments simples, assénés
sans exemples, ni preuves, mais qui ne sont pour autant ni complets,
ni exacts.
- Le conférencier prétend que les échanges africains
seraient essentiellement organisés avec les pays dits du Nord
et que : "donc un grand nombre de richesses de 1’A%ique sont contrôlées
par ceux qui maîtrisent les règles du marché mondial
." Cette phrase est gratuite, parce que les pays industrialisés
n’empêchent pas les pays africains de commercer et de s’entendre
entre eux .
Après avoir cité la dette extérieure
comme étant un autre facteur d’appauvrissement , ce qui est malheureusement
vrai , l’auteur indique que ce sont les pays dits du Sud, dont l’Afrique
fait partie, qui financent les pays fiches . Ce raisonnement n’est pas
exact . En effet , celui qui est endetté n’est pas dans la position
de financer son créancier, tant qu’il n’a pas remboursé
le capital emprunté , ni payé les intérêts
dûs , ce qui est le cas de l’Afrique jusqu’à présent.
Il faut souligner au surplus que les pays émergents ( expression
plus correcte que celle de pays du Sud ) portent une dette qui s’élève
encore à plusieurs centaines de milliards de dollars vis-à-vis
des pays industrialisés et des organisations internationales.
Ce reliquat subsiste après qu’un certain nombre de ceux-ci aient
cependant accepté des moratoires importants de dettes à
la fin des années 80 et au début des années 90.
- Il faut savoir que ,pour sa part , l’aide publique française
, directe et indirecte , c’est-à-dire celle qui est payée
par le contribuable , aux pays émergents ,principalement à1’A%ique
, atteint encore plusieurs centaines de milliards de francs. Il faut
rappeler que la France , qui est l’un des tout premiers prêteurs
au Tiers Monde par l’importance de sa créance totale publique
(celle qui est versée par1’ Etat et par les organismes qui
lui sont rattachés ) , a pris des mesures qui peuvent être
analysées comme un effacement partiel de sa créance
, à plusieurs reprises depuis quinze ans .
- - Par exemple, en 1996 , le gouvemement fiançais a effacé
600 millions de Francs de sa créance sur le Maroc et a transformé
400 millions de Francs de ses prêts en une subvention à
la construction d’écoles dans le nord de ce pays . Il faut
parler de la Caisse Française de Développement , établissement
public qui est une entité étatique française
,qui emprunte des milliards de Francs à la Bourse de Paris
et sur les marchés internationaux, avec la garantie de l’Etat
fiançais - donc du contribuable - , pour les prêter ensuite
aux pays émergents , en particulier à l’Afrque. Il faut
dire que le Trésor français est lié aux Trésors
locaux des pays africains francophones de la zone Franc par un compte
dit d’opération qui permet à ceux-ci de tirer automatiquement
sur la France les devises dont ils ont besoin pour leurs paiements
aux autre pays dans le Monde -Ils remboursent la France exclusivement
en Francs , généralement avec un grand retard.
4 - Il faut indiquer que les banques françaises
ont perdu de fait plus de 80 milliards de Francs entre 1982 et 1990
sur des prêts qu’elles avaient consentis auparavant aux pays émergents
,qui ne leur seront vraisemblablement jamais remboursés , qui
viennent donc en déduction des bénéfices et qu’elles
ont dû inclure dans le calcul des taux de leurs crédits
,logement et consommation, aux emprunteurs fiançais ,particuliers
et entreprises. Pour sa part , la Banque Mondiale a été
et est toujours confrontée à des difficultés identiques.
5 - Qualifier les quelques milliers de militaires
fiançais dispersés sur une vaste partie du continent africain
de forces d’occupation étrangères relève d’une
certaine affabulation . Une semblable qualification peut être
donnée , dans un autre ordre d’idées , à la comparaison
qui a été faite entre les tueries qui opposent les Hutus
et les Tutsis au Burundi et au Rwanda et les controverses qui séparent
nos amis belges ,francophones et néerlandophones.
Il est également dommage de parler d’une " certaine
montée de l’intégrisme " au Soudan, alors que l’on sait
que dans ce pays la dictature islamiste massacre d’une manière
systématique les populations chrétiennes du sud. On pourrait
relever un certain nombre d’autres partis pris, inexactitudes ou méconnaissances
des réalités . Ainsi , il est fâcheux que le conférencier
ait pu déclarer que la relève des ONG n’était pas
suffisamment assurée et préparée avec les Africains,
alors que l’action ,souvent ingrate et obscure ,toujours efficace et
surtout continue de ces Organisations ,en particulier des Communautés
religieuses , qui recueillent d’ailleurs les dons de dizaines de milliers
de Français , devrait appeler l’admiration et la prière
de tous.
Je regrette qu’un Prêtre puisse être aussi
peu objectif dans ses propos et que la Paroisse ait pu offrir à
l’intéressé une tribune et un retentissement qui n’étaient
pas mérités .
Jean-Louis Butsch.
|
|