Paroisse Saint Germain l'Auxerrois (92)

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Conversation à la sortie de l'Eglise (Réactions)

 

Conversation à la sortie de l’église…

    - Salut, Pierre ! Je ne t’ai pas vu dans l’église…
    - Salut, Paul, j’étais devant, tu étais près de la sortie... Mais viens : j’ai à te parler.
    - D’accord, moi aussi.  Mais éloignons nous un peu : avec ce carillon, on ne s’entend plus !
    - O.K. On prend un café ?
    - Assied- toi.  Ecoute, Paul, tu as vu la couleur des cheveux des gens dans l’église ? Presque tous gris ou blancs ! Combien serons nous dans dix ans ?
    - Mais, Pierre, pas de panique ! D’abord il y a de nouveaux arrivés plus jeunes, ensuite ce n’est pas la quantité qui compte : mieux vaut dix personnes qui y croient vraiment que cent qui viennent par nostalgie de leur jeunesse !
    - Tu sais, Paul, cette époque avait du bon ! Le jeûne avant la communion matinale, reçue à genoux sur la langue, le latin, …Oh, tu peux sourire ! Mais toutes ces contraintes, ça aidait les gens à se structurer : Il faut marquer les différences, les frontières. Il faut affirmer notre identité, faire régner la discipline, l’unité. Sinon, demain c’est l’Islam qui envahira tout. L’Eglise, ou bien on est dedans, ou bien on est dehors.
    - Je comprends ton souci, on a besoin de symboles, de rites, mais pas trop : ça fait fuir les gens qui les ignorent. On n’est pas une secte !
      Et puis, Pierre, il ne faut pas exagérer : tu approuves les gens qui trimbalent des reliques de Sainte Thérèse et les font suivre en procession ? Et ceux qui font venir de Lourdes de l’eau miraculeuse dans des récipients scellés, tu les approuves aussi ?
    -Parfaitement, c’est la foi des humbles. Il faut la respecter. Elle peut redonner aux gens le sens du sacré.
    -Et moi je pense que la seule chose qui soit sacrée, c’est précisément les gens, quels qu’ils soient.
Et enfin, Pierre, ceux qui sont à l’extérieur des remparts de l’Eglise, on en fait quoi ?
    -Il faut les évangéliser et baptiser ceux qui le désirent : ce que faisait Saint Paul précisément.
    -Saint Paul baptisait peu ou pas 1. Il pratiquait l’ouverture, visitait les Grecs et leur annonçait le Christ, les libérait….  Aujourd’hui, c’est un peu pareil. Regarde ce qui se passe autour de nous : avec la télé, les mobiles, internet, les voyages, les gens les plus éloignés par l’origine, la culture, la religion, deviennent nos voisins, notre prochain. Il faut les écouter, les aimer : L’Esprit saint est partout
    -Paul, si on te suit, on va vider complètement les églises : les vieux seront morts et les jeunes ne verront pas l’intérêt d’y venir.
    - Je pense que certains y viendront s’ils y trouvent un chemin d’intériorité, quelque chose qui donne sens à ce qu’ils vivent à l’extérieur, dans leur vie quotidienne. Et si au lieu de leur dire : « Fait pas ci- fait pas ça », on leur dit : Tu es formidable chaque fois que tu partages, que tu pardonnes... Tiens, voilà Jean ! Salut, Jean !
    - Bonjour ! Je vous écoute depuis deux minutes. Je pense que vous avez tout les deux un peu raison. D’accord pour l’ouverture au monde. Mais il faut des limites, des frontières pour qu’on puisse y ouvrir des portes et accueillir les autres ! C’est ce qu’explique Régis Debray dans son dernier livre 2. La bonne mondialisation ce n’est pas la fusion : c’est établir des relations entre des différences. Idem pour l’Eglise. Et ceci dans l’écoute, le respect et l’accueil de ceux qui ne sont pas avec nous, qui restent dehors.
     D’ailleurs, Benoît XVI le dit bien 3 : « il en est beaucoup dehors qui semblent être dedans, et il y en a beaucoup dedans qui semblent être dehors »  Et il ajoute : « En matière de Foi, d’appartenance à l’Eglise catholique, intérieur et extérieur sont mystérieusement entrelacés ».

     A nous d’en tirer les conséquences…Qu’en pensez vous ?


Serge Drabowitch, 8 décembre 2010    


  1 1 Cor. 1, 17
  2 Régis Debray, Eloge des Frontières, Paris, Gallimard, 2010
  3 Benoît XVI, Lumière du Monde, Paris, Bayard. 2010