En quatre étapes, le temps de l’Avent nous fait revivre la longue attente de l’homme dans l’histoire et dans sa vie de tous les jours. L’avent est le cri de la terre, qui monte vers le ciel comme une immense prière : Comment sortir des conditions précaires, comment avancer vers un avenir meilleur ?

Des images, des visages nous ont été présentés par la Bible pour nous apprendre à espérer. Le passage de l’évangile d’aujourd’hui fait la suite d’une liste de noms, liés les uns aux autres à la même lignée de sang, issue d’Abraham pour s’arrêter à Joseph l’époux de Marie, de laquelle naquit Jésus.

La Bible nous fournit des noms. C’est le livre qui nous donne le plus de noms propres. Quarante cinq noms précèdent le passage de l’évangile d’aujourd’hui, Chacun a son histoire à ne pas mettre dans toutes les mains. Ce qui est peu ordinaire encore, c’est que dans cette galerie des ancêtres figurent quatre noms de femme que d’ordinaire, on ne cite pas dans la généalogie. Thalamar, veuve de Juda fils déguisée en prostituée pour devenir femme de Juda père, Rahab, la prostituée de Jéricho, femme de Salmon, mère de Booz, Ruth, l’étrangère, femme de Booz, Bethsabée, femme d’Urie, que David a prise pour femme

Et l’espérance est qu’avec ces hommes et ces femmes, Dieu a écrit une histoire sainte. Il a fait, comme dit l’évangile de Matthieu la genèse de Jésus-Christ, fils de David fils d’Abraham.

Le Dieu de la Bible s’appelle "Emmanuel ", Dieu-avec-nous. Il n’exige pas de l’homme, une réincarnation continue, jusqu’à ce qu’il arrive à se débarrasser de sa carcasse de matière brute pour pouvoir s’approcher de Lui. C’est le Dieu qui ne doute pas de l’homme. Il s’incarne dans sa chair. Il se laisse voir sur le visage de certain.

L’Evangile de ce 4ème dimanche nous en fait rencontrer deux : Joseph et son épouse, Marie.

Avec Joseph, on sent que Dieu est là avec nous. C’est l’Annonciation faite à Joseph, alors que dans St Luc, c’est l’Annonciation faite à Marie. La seule différence est le silence de Joseph. " Il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : Il prit chez lui son épouse. "

Joseph n’a rien dit. On ne sait pas comment l’évangile peut lire sa pensée. Et comment Joseph sait si tôt que Marie est enceinte pour avoir le projet de la laisser partir avec son secret ?

Le fait qu’il garde Marie chez lui dit qu’il a un cœur qui peut lire le secret de l’autre. Plus fort que les pères modernes, il n’a besoin de recourir à personne, à aucun technique pour savoir que Marie attend un fils et que, déjà, il a un nom à lui donner. Le nom qu’il donne à l’enfant dit encore qu’il sait quel sera son avenir.

L’Evangile parle du songe qu’il a eu. Dans la Bible, le songe est un moyen de communication avec cet au-delà que la raison ne peut atteindre. Il révèle l’homme en état d’écoute et de disponibilité. Pour la psychanalyse moderne, c’est une fenêtre ouverte sur la profondeur du subconscient. Le subconscient de Joseph est habité par des réminiscences de la Bible. Son nom même est le nom de celui qui a été vendu en Egypte par ses frères parce qu’il est "l’homme aux songes " qui les dérange, mais qui les a tous sauvés, et l’Egypte avec, de la famine.

Joseph, l’époux d’amour, représente pour "Dieu-avec-nous ", la terre d’accueil qui lui donne un père, une mère, une famille, un nom, un pays, un métier.

Dans l’annonce faite à Joseph, Marie est aussi silencieuse que son époux. On ne sait pas si elle a dit son secret à Joseph. Leur silence en dit plus long, silence d’amour qui n’a plus besoin de parole, d’explication. Si l’on prend du temps pour contempler ce jeune couple qui attend ensemble la venue de leur enfant. Joseph et Marie, chacun à sa façon, doivent avoir plus que personne l’expérience de la présence du "Dieu-avec-nous ".

Comme une mère attentive, Marie doit sentir quelqu’un qui l’habite plus qu’elle ne le porte. La vie qu’elle a en elle a déjà le nom d’Emmanuel. Marie le sait. Joseph le sait. En silence, ils attendent de voir le visage du "Dieu-avec-nous " sur lequel chacun doit retrouver les traits de la famille.

C’est dans cette attente que le 4ème dimanche nous invite à entrer, à vivre intensément ce temps de désir.

Joseph, époux de Marie, Marie, Mère de Jésus, vous qui attendez en silence de voir le visage de votre enfant, apprenez-nous le silence de la vie intérieure, là où l’Eternel a promis d’écrire sa Loi, le lieu que votre Fils va reconnaître comme le Royaume des cieux.

D.L.