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4ème
dimanche du temps ordinaire
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Sophonie 2,3;3,13 1 Corintniens
1,26-31 Matthieu 5,1-12
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Les
Béatitudes.
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31
janvier 99
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C'est toujours émouvant d'écouter quelqu'un qui dit son admiration pour quelqu'un d'autre. Et l'homme qui admire ici, c'est Jésus. Il se trouve devant une foule qui le suit jusqu'à ce coin reculé. Il y voit des hommes et des femmes avec leurs enfants qui sont toujours là prêts à l'écouter. Nous comprenons mieux cette page de l'Evangile que l'on appelle les Béatitudes si nous ne quittons pas des yeux cette rencontre entre Jésus et la foule. Nous avons appris par cœur ces béatitudes ; nous les trouvons merveilleuses. Mais sans oser le dire tout haut, nous avons du mal à comprendre, à accepter la pauvreté, la faim, la soif, ce qui vous fait pleurer comme ce qui fait notre bonheur. Nous savons qu'on a dû réaliser des tours de force d'explications pour nous convaincre que c'est être bienheureux que de rester pauvre, rester dans la faim et la soif. Les affamés, les pauvres, les miséreux que l'on nous montre de temps à autre sur le petit écran, pouvons-nous les voir comme des bienheureux de l'Evangile ? Il nous faut revenir à cette foule que Jésus trouve devant lui. C'est le début de sa vie consacrée à annoncer le Royaume des Cieux. Il voit tous ces hommes et femmes qui le suivent depuis un bout de temps, oubliant leur condition sociale, quittant leur maison, tous, ensemble, formant cette foule qui l'écoute, le suit. Il voit sur leur visage cette soif de joie, de bonheur, de justice, mais aussi cette inquiétude, cette angoisse qui lui dit combien ils sont déçus, humiliés, désespérés de la vie. Il trouve dans leur regard ce dépouillement, ce vide intérieur qui crie, qui appelle et attend quelque chose de plus sûr, de plus solide, qui respecte davantage la condition humaine. La Bible, plus d'une fois, appelle ces personnes les humiliées de la terre, le "petit reste" qui seul peut survivre à toutes les destructions massives que le peuple a connues dans son histoire. Récemment, André Chouraqui, Maire adjoint de Jérusalem, le premier juif à avoir traduit les évangiles des textes originaux en langue française, a trouvé que le mot "heureux" ou "bienheureux" a plutôt la signification d'un commentaire que d'une traduction fidèle. On aurait dû suivre le mot hébreu "Iashar" qui exprime une exclamation devant quelqu'un plein de dynamisme et de souffle. Quelle force, quel souffle vous anime, vous les humiliés ! Quelle force et quel souffle, vous qui avez faim, vous qui avez soif, vous les miséricordieux, vous les artisans de paix ! ..... Il y a dans cette façon de dire et l'admiration et la compréhension exacte de la situation de ces personnes qui nous font passer au-delà des richesses, des bonheurs de ce monde. Tout est ici dans les nuances des mots. Et l'on peut dire alors à tous les éprouvés de la Somalie, de l'Ethiopie, du monde entier, la béatitude de l'évangile sans les choquer. Quelle force, quel souffle vous devez avoir pour être ce que vous êtes maintenant ! Vous êtes en marche vers un monde où la richesse est dans ce qu'on est et non pas dans ce qu'on a. Il s'agit toujours de la béatitude mais de la béatitude qui vient d'une certaine manière de vivre, de se comporter devant Dieu, et non d'une béatitude spéculative, morale. L'ensemble de ces exaltations pour les pauvres, les humbles, les petits forment le "Sermon" sur la montagne. Chacune des "béatitudes" évoque au fond tel ou tel épisode de l'histoire Israël : le dépouillement d'Abraham, la douceur de Moïse, la confiance de Ruth, la ferveur de David, la piété d'Isaïe, le dénuement de Jérémie, la fougue d'Ezechiel, la candeur de Suzannne, l'intériorité des psalmistes. Le tout donne une description émouvante et très forte de ce que fut la vie de Jésus de Nazareth, le chemin royal qui nous mènent au mystère de la vie. Enfin, une à une, les béatitudes, selon l'usage de la Bible, pour ne pas prononcer le Nom de Dieu, s'expriment sous forme du troisième pronom personnel : Quelle force, quel souffle, les miséricordieux car ils obtiendront la miséricorde ! Qui pourra donner sa miséricorde sinon, l'Eternel, Le Seigneur Vivant ? Les béatitudes sont vraiment cette manière de vivre la vie d'homme qui laisse voir la présence de Dieu dans le monde. D.L. |
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