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23ème
Dimanche ordinaire.
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{Is;35,4-7a
Jc 2,1-5 Mc; 7,31-37 |
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EFFATA
!
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7
septembre 97
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Si le génie de la Bible est de nous initier au sens de Dieu, le génie de l'évangile est de nous dire qui est Jésus. Les évangélistes ne sont pas des historiens. Ils sont témoins de Jésus ressuscité. Ils écrivent leur évangile à la lumière de leur expérience inouïe : la rencontre avec Jésus vivant. Ils ont voulu transmettre les convictions profondes qui ont animé chaque moment de sa vie. Jésus est le Serviteur de Dieu, au sens messianique qu'annoncent les prophètes. Il a le sens de Dieu, et le sens des hommes comme personne ne l'a jamais eu. La nouveauté de l'Evangile c'est que Jésus est Emmanuel, Dieu parmi nous. Tout ce qu'il dit, tout ce qu'il fait est signe de sa mission et de sa personne. Nous trouvons aujourd'hui Jésus en dehors de la frontière palestinienne, au territoire de la Décapole. Et là, il guérit un sourd-muet. On a pu relever très vite que seul Marc a retenu cette guérison. A travers des détails précis et évocateurs, on reconnaît les souvenirs personnels de Pierre, témoin émerveillé de l'événement. C'est lui qui doit le raconter à son disciple, Marc. On sait que son évangile est écrit en grec et voilà que pour la deuxième fois, il y a cette parole mystérieuse rapportée en araméen : Effata, ouvre-toi. La première fois, c'est au chapitre 5, verset 41 : "Talita Koum", encore une expression araméenne qui veut dire " Jeune fille, lève-toi !" Effata: ouvre-toi, ou Talita Koum : Lève-toi, ces paroles redonnent bien le mystère et l'enseignement de Jésus. Nous naissons tous dans un monde clos ou du moins limité. La parole du Christ, Effata, nous ouvre à Dieu en nous donnant le pouvoir de l'écouter, et de lui répondre. Elle nous ouvre à la communauté des hommes. Etre religieux, comme la Bible l'a relevé, c'est être à l'écoute, capable de communier, de communiquer avec les autres. Aucun mot ne convient mieux, aux parents, aux enfants, en cette période de la rentrée que ce mot si simple : Ouvre-toi ! C'est le geste de l'éducation qui initie les enfants comme les hommes et les femmes de tout âge au geste d'écouter et de parler. Tout au long de notre vie, nous apprenons à écouter et à parler. Car c'est l'acte essentiel lié à la vie. C'est l'appel permanent de Dieu dans la Bible pour amener l'homme jusqu'à lui. "Ecoute Israël !" Il est toujours émouvant de revoir chaque année, la rentrée des enfants à l'école. On est très excité, on est bien brave en préparant la grande aventure d'aller pour la première fois à l'école, mais le moment venu, c'est le déchirement. Il faut quitter le cercle intime et entrer dans la vie. Les parents qui ont élevé leur enfant voient qu'ils ne peuvent pas tout faire, et qu'ils ont à recourir à l'aide des autres. Les éducateurs assument leurs responsabilités en rassurant les parents émus que tout va bien se passer . Les regards se cherchent. Et dès que l'enfant trouve le regard rassurant, volontiers complice de sa peur, c'est déjà l'ouverture. Alors, on écoute, on entre dans le jeu, et quand on parle, c'est le signe que la confiance est gagnée. C'est le début de l'acte de croire. La foi est la capacité de dire un non-dit, de parler de ce qui ne se voit pas. La vie spirituelle fait partie ainsi de la vie réelle, de la vie de tous les jours. C'est la relation entre les hommes, et les hommes avec Dieu. L'enseignement de Jésus nous l'a rendue proche, intime et sacrée. Même les non-juifs, comme c'est ici le cas, les gens de la Décapole, comprennent le geste de Jésus. Vivement frappés, ils lui rendent hommage:" Tout ce qu'il fait est admirable." L'enseignement de Jésus est donné avec des mots de tous les jours, avec des gestes de sympathie. Et on ne sait par quelle magie d'élocution, de piété, la vie spirituelle est classée pour beaucoup, à l'heure actuelle, comme un sujet tabou. Il ne faut pas en parler, c'est une affaire privée. Quand Jésus emmène le sourd-muet à l'écart, loin de la foule, c'est qu'il ne veut pas que les témoins puissent interpréter les gestes qu'il fera ou les paroles qu'il dira comme une magie, un rite de sorcellerie. Par cette discrétion, le symbolisme de ce miracle apparaît dans toute son authenticité. Jésus est venu parler au nom de Dieu, nous révéler les messages d'amour du Père. Il est venu rendre l'homme capable d'entendre la Parole et de l'exprimer. Beaucoup plus que le soulagement d'une infirmité, nous assistons au cours de cette guérison à une "représentation " de la transformation opérée par Jésus. Cette transformation, Isaïe l'appelait " : la vengeance qui vient" ou encore : " la revanche", il décrit la remise en ordre universelle avec la guérison des aveugles, des boiteux, des sours et des muets. C'est dans cette ligne-là que Jésus manifeste son émotion pour les infirmes. Les Evangiles sont des récits, des témoignages de ce que le Christ a fait pour tous les hommes, en se mêlant à leur vie. Par ce contact avec la vie des hommes, Il a donné à tous leurs vécus humains, profanes, terre à terre, une dimension qui va jusqu'à entrer dans la vie en Dieu. Toutes les rencontres du Christ rapportées par les évangiles, depuis les hors-la-loi, les païens, jusqu'à ceux qui sont les plus démunis de la terre, les lépreux, les aveugles, les handicapés, les sourds-muets, les pécheurs publics, toutes nous mènent au contact avec la vie en Dieu, et la vie entre les hommes. D.L. |
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