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Le Jubilé , comme
la mémoire de 2000 ans de rédemption, nous fait vivre le carême dans une
longue histoire de relation entre Dieu et les hommes. Nous retrouvons
le désir de Dieu de se mêler aux affaires des hommes.
Après l’alliance avec Noé, le voici en négociation avec Abraham.
La pacification d’un environnement une fois acquise, Dieu prendra soin
de remettre l’alliance à un autre niveau. Comme les étoiles dans le ciel,
comme les grains de sable au bord de la mer, ainsi seront ses descendances.
Pour être au niveau de l’incommensurable du nombre, la qualité de la relation
avec Dieu gagnera en profondeur. La relation « paternité-filiation »,
quittera le terrain confusionnel, fusse-t-elle au prix d’une déchirure,
pour devenir des relations personnelles, uniques. C’est l’histoire du
sacrifice d’Isaac.
A chaque étape de
l’alliance, l’homme se rapproche de Dieu, se dépouille un peu plus,
et Dieu entre dans tout ce qui est humain, son esprit, son cœur,
son langage, ses coutumes, sa vie. La rencontre de l’homme avec
Dieu se voit dans le regard de l’homme. Désormais, au cœur des absurdités
de la vie, l’homme peut voir au-delà des événements, dire son espoir,
et se mettre au travail pour faire évoluer le monde. Devant la mort,
il pense à la naissance, à la vie. Il témoigne de la présence rencontrée.
Le symbole de la foi des chrétiens n’est pas d’abord la croix, mais
un poisson, « ictus », christ, signe de celui qui est
plus fort que la mort.
A écouter l’Evangile
qui raconte ce que dit Jésus,
ce que fait Jésus, on garde l’impression que sa vie est relation,
celle avec le Père, celle avec les hommes. Il laisse entendre qu’il
est venu comme l’Alliance du Père avec les hommes, et les hommes
avec le Père. La mémoire de l’Incarnation regarde Jésus qui vient
vivre au milieu de la communauté humaine.
Depuis quelques
jours, Jésus ne cesse de parler de la mort, sa mort, de ses souffrances.
Cette absurdité qu’est la mort, serait-ce pour que nous tombions
tous dedans que la vie nous a été donnée ?
Six jours après
l’annonce de sa mort précise Marc, Jésus
gravit une haute
montagne avec quelques disciples. Il est à l’écart, le lieu habituel
de sa prière. Dans ce lieu de Dieu, il laisse voir ce qu’il a déjà
dit quand il parle de sa mort. Il n’y a pas de mort sans naissance
à la vie. « Le Fils de l’homme devait souffrir, être rejeté par
les anciens, les grands prêtre et le scribes, être mis à mort et,
après trois jours, ressusciter. »
Le récit de la Transfiguration
de Jésus dit ce sentiment d’émerveillement et de frayeur
des trois apôtres devant le vrai visage de Jésus. Ils voient sur
ce visage transfiguré la vraie identité de Jésus. Dans cet homme
de Nazareth qu’ils ont suivi depuis un moment, ils découvrent le
Fils de Dieu tel qu’il doit être dans son Père, ils entendent ce
que Jésus a entendu lui-même, lors de son baptême : « Celui-ci
est mon Fils bien-aimé.
Ecoutez-Le ».
La plus grande consigne que les enfants d’Israël ont reçue jusqu’ici
comme la parole essentielle de l’Alliance :« Shema
Israël », « Ecoute Israël », se précise à la transfiguration.
Il n’y pas seulement les commandements à écouter. En Jésus, il y a la Parole de Dieu
à regarder, car ici, la parole ne se prononce pas, elle se laisse
voir. A le voir, on sait parler à Dieu, on sait qui on devient.
« Dieu s’est fait porteur de la chair pour que l’homme puisse
devenir porteur de l’Esprit, « pneumatophore ». L’homme
transfiguré laisse paraître
à travers son corps opaque, la même lumière vue par les trois
disciples sur les vêtements de son maître. Ils sont « resplendissants,
d’une telle blancheur qu’aucun foulon sur terre ne peut blanchir
de la sorte ».
La mémoire de l’Incarnation découvre qu’en Jésus, le monde est secrètement
« buisson ardent ». Il brûle sans être consumé. La transfiguration du corps, de tout corps,
se voit même sur un visage défiguré, dans la lueur de son regard
angoissé. La souffrance crie le désir secret d’être transfiguré,
d’être passé au-delà de la condition de tous les jours. Ce qu’on
appelle l’évolution de la nature est la lente intégration de l’homme
et du monde dans le mystère « mort-résurrection »que nous
trouvons dans le mystère pascal.
Elie et Moïse, deux têtes de lignes, la Loi et les prophètes, qui
ont contribué à éduquer le peuple de Dieu et à faire avancer l’Alliance,
sont là, comme sur le Sinaï et l’Horeb, pour témoigner de la continuité
de l’engagement de Dieu en Jésus. L’Alliance continue. Sa vie dans
le monde entraîne tout avec lui, vers son retour
dans la gloire, la Parousie. C’est le jour où l’humanité,
où chacun de nous s’incorpore dans le corps glorieux de Dieu-homme,
Jésus à la transfiguration. D.L.
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