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19ème
dimanche du temps ordinaire B
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1
Rois 19,4-8 , Ephésiens 4,30-5,2 , Jean 6,41-52
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La fin
de l'homme
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13 Aout 2000
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LEvangile est pour nous le livre de repères. Le sens de notre vie, celui de tout ce que nous vivons ici dans lEglise, la motivation de notre présence régulière au jour du Seigneur se trouvent et se retrouvent dans les paroles de ce livre. Pourtant le passage de lévangile de St Jean que nous venons
de proclamer nous fait sentir demblée lécart du langage
et des vocabulaires utilisés. Presque la totalité des paroles de
Jésus exprimées dans les 10 phrases de ce 6ème chapitre de St Jean,
sont si loin de la conversation ordinaire, donc, difficilement accessibles,
si nous narrivons pas à les replacer dans le concret de la
vie. St
Jean, en relatant le récit, a noté lui-même la réaction de gens
qui ont entendu Jésus qui affirme: « Moi, je suis le pain
qui est descendu du ciel ». Ils protestent contre cette affirmation
en mentionnant doù vient Jésus. Tout le monde sait qui est
son père, qui est sa mère. On connaît leur nom. Lui rappeler son
origine, cest rendre ridicule ce quil avance. Depuis plusieurs semaines, chaque dimanche
un mot revient sans cesse dans la liturgie de la Parole : celui
du pain. On nous a lu des pages de lAncien Testament où le
pain est mentionné. Pains dorge distribués par Elisée, manne,
pain qui fortifie Elie, banquet de la sagesse. Cest tout un
ensemble de textes bibliques où les récits de lAncien Testament
et les psaumes alternent avec les gestes et les paroles de Jésus,
tous parlent du pain. Pourquoi faut-il autant de citations
pour parler dune nécessité qui ne fait plus lobjet de
notre première attention : le pain ? Sans doute, après la messe,
on se rencontre souvent chez le boulanger du coin.
Le pain nourrit, et il reste la nourriture de base, mais
est-il vraiment ce que l'on cherche et demande en premier ? Le SDF
peut écrire sur une petite pancarte qu'il a faim, et cependant il n'attend pas
nécessairement que le passant
lui donne un morceau de pain. Quelle tête
fera-t-il si vous
lui tendez un morceau de pain ?
Ce quil attend, c'est plutôt " sa liberté imprimée
ou frappée", comme disait une définition antique de la monnaie,
les fameux "cent balles" ; " tas pas cent balles"
? Le pain est devenu aujourd'hui en réalité un symbole, pour tous,
riche ou pauvre. Aussi
continuons-nous à demander : donnez-nous aujourdhui notre
pain de ce jour, comme le Christ nous l'a enseigné, mais attendons-nous
simplement la distribution dune miche de pain ? Le pain
quotidien que nous demandons nest-il pas plus complexe ? C'est
tout un ensemble de choses
qui fait notre vie. Deux mille ans déjà nous séparent de
ce rassemblement autour du Christ où il se présente comme "le
pain qui est descendu du ciel". Tous les détails vivants du
récit sur la multiplication des pains, St Jean les
a tous utilisés pour dire qu'il est conscient de la vraie faim de
l'homme. Il
a retenu comment le Christ la pris en considération et comment
il a aidé les hommes à aller au delà des besoins immédiats : "
ne travaillez pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture
qui se garde jusque dans la vie éternelle." Lessentiel
se trouve dans des relations qui durent, dans la connaissance intime
de lautre. La vie éternelle est de lordre de la connaissance
comme il la expliqué dans sa prière. Quand on prend ensemble un casse-croûte,
on pense moins à ce quon mange quà ceux qui sont là
pour être ensemble. On se restaure avec la présence de lautre.
Le partage sétend naturellement au delà de la nourriture.
La joie apportée par chacun ajoute au goût de la nourriture et donne
un air de fête. Le goût du pain dépend beaucoup de lenvironnement
où lon se trouve pour le manger. Le même pain peut avoir le
goût amer ou le bon goût de lamitié. Pour qui sait observer le besoin de
lhomme, sa véritable faim, combien est évocateur le discours
sur le pain descendu du ciel, lauto-révélation du Christ :
Je suis le pain de vie ! Il sen dégage des niveaux différents
de besoin dans le coeur de lhomme. Pain de vie, il laisse voir que les
aspirations profondes de lhomme révèlent les soucis de Dieu
qui cherchent à y répondre en les faisant sentir plus vives encore
dans son coeur. Rien ne peut les assouvir sinon une présence. La
vie de Jésus inspire mille façons dêtre présent les uns aux
autres. Pain de vie, il est le projet de Dieu
qui sest fait chair. Dans le langage humain, il y a des façons
très fortes de dire quon est présent les uns aux autres. Les
époux vietnamiens sappellent l un
lautre, "mon corps". Le mari est le corps
de sa femme et la femme est le "corps " de son mari. Jésus
a aussi sa façon de dire comment il veut être présent dans notre
vie. " Le pain que je donnerai, cest ma chair, donnée
pour que le monde ait la vie." Pour rendre accessibles les
paroles de lEvangile de ce dimanche, il est bon de nous rappeler
quelles nous sont transmises par ceux qui ont devant leurs
yeux la présence de Jésus mort et Ressuscité, rencontré au matin
de Pâques. Leur témoignage a pour seul but de nous faire voir comment ils lont
vu. On ne peut comprendre ces paroles que sur leur témoignage. LEvangile
est une école de relation. Comme dans toute vraie relation humaine,
naturellement on donne son crédit à lautre parce quil
est lautre. Ce dont lhomme a besoin
cest de la présence de lautre qui nous fait vivre du
plus profond de nous même. On ne sétonne pas alors de lexpression
particulièrement forte de lEvangile: manger le pain de la
présence pour pouvoir être soi-même la présence pour les autres.
Quant à la présence du Tout Autre, elle passe par la présence des
autres. D.L. |
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