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1er dimanche de Carême B
 
 
Genèse 9,8-15 - Pierre 3, 18-22 - Marc 1, 12-15
 
     
 
Le désert
 
     
 
9 mars 2003
 
     
 

Jusqu'ici, la liturgie est dans la lumière de l'appréciation que Jésus a reçue de son Père : " Tu es mon Bien Aimé en Toi, j'ai mis toute ma complaisance. " Nous avons essayé de cerner cette identité chrétienne dans la vie de tous les jours, et nous sommes amenés aujourd'hui à entrer dans ce grand temps que l'Eglise a voulu aménager pour nous permettre de suivre les dernières étapes de sa vie.

La première lecture nous replace dans le contexte du peuple d'Israël. Nous remontons au premier temps de l'Alliance. On peut d'abord apprécier ce premier logo qui se dessine au ciel en multicolore, l'arc en ciel, qui dit le désir de Dieu de se mêler aux affaires des hommes. Il prendra soin de remettre à neuf chaque fois qu'il y aura des dégradations dans l'univers. L'homme est invité à prendre soin de l'environnement qui lui a fourni tant de bonnes choses pour son bonheur de vivre.

L'homme et le cosmos sont saisis dans la même sollicitude de Dieu. Mais on voit encore ici la trace de la volonté de l'homme de prendre Dieu comme l'assureur de sa sécurité. Il faudrait qu'il n'y eût plus de fléaux naturels. Alors que l'Alliance que Dieu propose est d'un autre ordre. L'homme a à apprendre lui-même comment vivre dans son environnement, comme prévoir et se prémunir contre les fantaisies de la nature.

Le portrait de Jésus, Fils de Dieu, poussé par l'Esprit au désert, tenté par Satan, nous replace dans la vraie position de l'homme face à l'Eternel. Sans entrer dans les détails des trois tentations types, durant son séjour dans le désert, comme le font St Matthieu et St Luc, St Marc nous montre l'aspect plus concret de la tentation de Jésus. On se plaint parfois de nos jours d'être obligé de vivre dans une tentation permanente. Mais toute la vie de Jésus a été une longue tentation.

Jésus vit dans une époque déboussolante. En politique, le pays est occupé par les Romains. Collaborateur et résistant s'opposent et chacun veut attirer Jésus dans son camp. Au plan religieux, on vit dans une période d'attente d'un messie glorieux qui va rétablir le pouvoir d'Israël. On a voulu un jour, faire de Jésus un roi, lui évitant ainsi de passer par la mort violente. En théologie, les groupes s'affrontent, pharisiens, sadducéens s'approchent de lui pour " le tenter " en lui posant quelque " colle " qui le disqualifiera. Ses disciples eux-mêmes qui ne comprennent rien à son mystère veulent le détourner de sa voie tragique. On sait comment Jésus a repoussé durement Pierre : arrière de moi tentateur. Et Jésus a connu des tentations qui viennent de lui-même, des limites de sa condition humaine. Dans le jardin de Gethsémani, il ne voit plus rien. Il est au bord du découragement : " Père, pourquoi m'as-tu abandonné ? "

C'est au long d'une vie parsemée de tout genre de tentations que Jésus nous a laissé voir comment on peut vivre tel que Dieu peut y trouver en priorité toute sa place. C'est sa personne qui est pour le monde la Bonne Nouvelle et son comportement, l'enseignement évangélique.

En ce premier dimanche, la première étape du cheminement vers la Pâque, Jésus nous met avec lui dans l'environnement originel de l'homme religieux: le Désert. Toute la Tradition biblique a opté le désert comme le lieu des premiers amours de Dieu et de son Peuple. Le désert entre dans la racine même de la langue hébraïque, dans sa façon de penser les choses, le monde, l'au-delà de ce monde.

Le désert se dit en hébreu " Mid-Bar ", c'est " le hors de, " le " à partir de la parole, ", le lieu vide de parole, le champ premier du monde, le tohu-bohu, tout est encore à l'état informe. C'est de ce lieu absent de parole, donc de vie, que la Parole se fait entendre, appelle chaque chose à son existence, chacune par son nom. Le désert devient le lieu de la plénitude première. Le Désert va de la voix au réel. Et ce passage de Dieu, ce déplacement de lui-même à quelque chose d'autre que lui-même, mais dépend totalement de lui pour exister, ce flux de vie, c'est son souffle, ruah, " son souffle qui plane sur la face des eaux. " Le désert est donc le vide que Dieu aspire dans la plénitude de son être et cet appel de vie et d'amour pour les créatures, c'est sa voix créatrice. Il dit " que la lumière soit, et la lumière fut. "

Il est écrit que " Au commencement était le Verbe, " le frémissement du Mystère, " " la vibration sonore de ce qui est caché en Dieu. " Et le Verbe s'est fait chair. "Le secret de toute chose, de chacun de nous qui est comme l'unique devant lui, est dans la vibration lumineuse de la voix, cette voix qui parcourt les déserts à la recherche du bien-aimé. " Fille de Jérusalem, ne réveillez pas l'amour avant qu'il ne le veuille. "

Avec le Christ " poussé par l'Esprit au désert ", nous sommes remis à la disposition du commencement de l'action de Dieu, en dehors de Lui-même. Ce moment de genèse est merveilleusement représenté par l'immensité du désert, et plus concret encore, à la portée de nos mains, cette pincée de cendres sur notre front. Les cendres ne représentent pas seulement l'état éphémère des choses. Sous les cendres, couve le feu. C'est le désert de ruine provoqué par les hommes. Que le flux de vie souffle de nouveau, et le feu va reprendre. Ce sera la recréation, ou mieux encore, la Résurrection que nous trouverons au bout de ce temps de Carême. D.L.