La Sainte Famille : Joseph, Marie, Jésus.
C'est tout naturel que nous avons célébré en
famille, Noël et les festivités du nouvel an. Aussi, la
liturgie consacre-t-elle ce dernier dimanche de l'année qui
s'achève comme la journée de la Sainte Famille. Saint
Matthieu que souvent nous trouvons friand de beaux discours, ne nous
fait pas un exposé sur la famille.
Il ne nous montre simplement la première famille chrétienne,
celle dont le christ nouveau-né a tout reçu, celle qui
a donné une éducation au Christ. Cette famille, c'est
Joseph, Marie, Jésus. On ne les voit pas parler beaucoup entre
eux. Les évangiles n'ont retenu que deux fois, Marie a parlé
à son enfant .Aussi, Jésus ne s'adressait que deux fois
brièvement à sa mère en l'appelant d'une façon
vraiment insolite :" femme".
On peut dire que c'est cela la famille dans la Bible. On se parle
peu entre homme et femme. Nous pouvons chercher longtemps pour trouver
un mari qui parle amoureusement à sa femme. Tout ce que l'homme
aurait dû parler à sa femme, et la femme à son
homme a été comme prêté à Dieu pour
qu'il s'adresse à son peuple. Le langage amoureux de l'homme
et de la femme est devenu ici les paroles de prière et de louange.
C'est le dialogue perpétuel de Dieu à son peuple et
de son peuple à Dieu.
"Je te fiancerai à moi pour toujours, par tendresse, par
amour." Os.2,21. "Je t'aime d'un amour éternel, aussi
t'ai-je étendu ma faveur."Jér.31,3.
"Seigneur, ton amour m'est plus précieux que la vie."Ps.24,4
"Seigneur tu m'as restauré avec des gâteaux de
raisin, et je suis malade d'amour."Cant.2,5.Dès l'aube,
je Te cherche, ma chair languit auprès de Toi.
Mais ici, même ces mots d'amour ne sont pas aussi forts pourparler
de ce qui s'est passé, et le silence de Joseph, de Marie, et
de Jésus nous apprend mieux encore ce que peut être la
famille que Dieu attend. Ici, chacun dit "moi" dans l'autre:
Joseph dans Marie, Marie dans Jésus, et Jésus dans "son
Père". Le "Je" pronom personnel de chacun est
l'autre.
Et l'autre ultime des trois c'est cet Enfant-Dieu qui va nous dire
un jour :" Croyez-m'en ! Je suis dans le Père et le Père
est en moi."
La famille est le lieu de l'intériorité, et de dépassement.
C'est le lieu où Dieu se révèle et parle. Car
c'est aussi le lieu où nous conjuguons tout au long de la vie
à tous les moments, les verbes les plus forts de la vie humaine.
Naître. Aimer. Engendrer. Vivre. Se nourrir. Elever. Eduquer
c'est à dire Transmettre et recevoir la Mémoire de la
vie. Servir. Etre ensemble devant la solitude de la vie. Mourir. C'est
en vivant à fond tous ces verbes que l'homme rencontre Dieu
écoute Dieu qui parle à travers ces vécus humains.
Il est impossible de rencontrer Dieu si l'on ne se rencontre pas encore
en famille. Le non-sens de Dieu n'est-il pas d'abord le non-sens de
la relation humaine ou l'incapacité de penser à l'autre,
de penser l'autre.
Car c'est dans les vécus profonds de l'homme que Dieu trouve
des images pour parler du mystère de la vie en Dieu. Dieu est
Père. Dieu est Fils .Dieu est Relation Père-Fils, intérieur
profond comme le souffle ou l'Esprit. La famille biblique est ainsi
le lieu éminent où les enfants peuvent forger leur personnalité.
Ils n'ont pas à revendiquer leur autonomie. Elle est donnée.
Car c'est pour eux que la Bible est écrite. "Donne-moi
des fils, sinon je suis morte, moi, disait Rachel à son mari.
La famille c'est le foyer, comme le mot a si bien dit, le lieu où
rayonne la chaleur, où l'on est heureux de rentrer le soir
venu.
Quoi d'étonnant si l'on se sent froid, à son intérieur,
autour de soi, quand on a perdu de mémoire ce que c'est un
foyer humain ? La psychanalyse moderne essaie de retrouver la chaleur
perdue, essentielle à l'homme pour retrouver son équilibre.
Elle a touché à la blessure. Mais le vrai père,
la mère véritable, le fils "comme on attendait"
ne s'inventent pas. Et on tourne ainsi en un cercle vicieux ne pouvant
pas débarrasser le visage de l'autre qui n'est pas autre chose
la réplique de son moi perturbé.
La Bonne Nouvelle c'est que Dieu est devenu Fils. C'est Lui qui
sauve le père et la mère, conscients de leur mission,
capables maintenant de donner des enfants qui peuvent envisager, eux
aussi à leur tour, que la vie reçue, c'est pour la donner
aux autres.
D.L.