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{calendrier
liturgique} | ||
{Jérémie
31,31-34 5ème - Jean 12,20-23 - Hébreux 5,7-9 | ||
Voir Jésus | ||
02 avril 2006 | ||
VOIR JESUS Quand l'homme se voit devant l'immensité de Dieu et il se réajuste à cette dimension divine. Il peut arriver à ce réajustement en contemplant Jésus qui chemine vers le Père. Ce sont ses derniers jours qui nous révèlent le plus, sa relation avec le Père. Il laisse voir le dernier moment de sa vie comme un passage. Personne ne peut voir le Père sans être transfiguré. La transfiguration est présentée ici comme le grain mis en terre pour qu'il porte beaucoup de fruits. Cette mutation en homme spirituel ne se fait pas sans bouleversement.
Il faut tout laisser pour entrer dans le monde de Dieu. Le corps charnel tremble
au moment où il va être transfiguré. C'est l'heure cruciale
qui doit venir à chacun de nous comme elle est arrivée à
Jésus et à bien d'autres partis avant nous. Avec le Christ, nous
pouvons bénir cette heure de rencontre et de bonheur. Ici, l'homme retrouve
lui-même, tout son être, dans la Source de Vie. En suivant le Christ
jusqu'au sommet de sa vie, on peut tout savoir de cette heure. Les destinataires de l'épître aux Hébreux ressemblent fort aux auditeurs de Jérémie. Une fois de plus, Jérusalem est menacée de destruction, cette fois par les armées romaines. En 70, une fois de plus, ruines, cadavres, files d'esclaves vers les marchés de l'Empire. A cette poignée de chrétiens hébreux désemparés, leur correspondant présente un Christ encore plus désemparé : le Christ de Gethsémani, le Christ de l'agonie (Lc 22,44). C'est le Christ " aux jours de sa chair", ce dernier mot indiquant les limites, la faiblesse, l'imperfection de la condition originelle de l'homme. Jamais Jésus n'est apparu aussi "chair", c'est-à-dire aussi faible, aussi homme qu'en cette nuit des oliviers. Par l'intermédiaire des apôtres André et Philippe - deux noms grecs -, ils demandent à "voir Jésus". On devine qu'avec Jean il s'agit de bien autre chose que de s'approcher de Jésus pour le regarder de plus près. Dans le quatrième évangile le verbe voir se charge d'un poids théologique. II nous oriente, non vers une plus claire perception d'un objet, mais vers une pénétration d'un secret de Dieu. Ici, il s'agit de mieux "voir" le mystère de la personne de Jésus. Jean le théologien oppose le regard superficiel et même haineux des chefs juifs au regard fasciné et profond des visiteurs grecs. Ceux-ci cèdent à l'attirance du Père : " Nul ne peut venir à moi si mon Père qui m'a envoyé ne l'attire" (Jn 6,44). Les discussions dans lesquelles se complaisent les juifs sont aveuglantes. Il s'agit de céder à la douce pression du Père. Celui-ci dirige nos yeux du coeur vers son Fils, plénitude de la révélation. Voulons-nous "voir" Jésus? Ce ne sera pas en discutant à perte de vue sur lui, en essayant de le ramener à tout prix à notre petit angle de vision humaine. Certes, un regard critique est nécessaire. Mais celui-ci serait vide et même néfaste s'il ne s'enveloppait de la chaude lumière de la foi. Cédons à l'attrait du Père. La brève parabole du grain de blé qui meurt et qui renaît nous offre un petit traité de christologie. Elle nous présente le Christ dans toute la réalité de sa condition " charnelle" : " Le Verbe s'est. fait chair. > Certes, il est le Logos de Dieu, mais abrité sous la fragile tente que les tempêtes déchireront en lambeaux. Jésus se trouble devant la mort de son ami Lazare Un 11,33), mais plus encore, jusqu'à la nausée, devant l'approche de sa propre mort: " Maintenant, je suis bouleversé. Que puis-je dire? Dirai-je : Père, délivre-moi de cette Heure ?" Cela, il ne peut le dire. Son Heure est celle de la plénitude du salut. Elle sonne pour lui. Dans le langage biblique, l'heure d'une personne est le terme suprême de sa mission. "L'heure de la femme" (Jn 16,21) est celle de l'enfantement, parce qu'alors la femme révèle pleinement sa féminité. "L'Heure de Jésus" est celle de sa passion et de sa mort, parce qu'alors il porte à son achèvement sa mission, le salut de l'homme. Le grain de blé, enfoui en terre, meurt, renaît et porte du fruit. Image suggestive du mystère pascal. Chaque homme a son heure : une mission à remplir. Suis-je une semence stérile ou un grain porteur d'avenir? Nous voici invités à entrer dans le mystère de la Passion. " Si quelqu'un veut me servir, qu'il me suive!" Sur nos routes zigzagantes, le Christ en croix est notre étoile polaire. " Pour moi, quand j'aurai été élevé de terre, j'attirerai à moi tous les hommes". II exerce sur nous comme une force magnétique; il imprime à notre personne un mouvement vers le haut. Cette attraction s'exerce sur tous les hommes et tout au long de leur vie. Un rayon mystérieux sort de la croix, du sacrifice du Christ : il vient solliciter tout homme à se tourner vers le seul Sauveur. S'il nous était donné de voir l'univers des consciences comme nous apercevons celui des corps célestes par une nuit claire d'hiver, nous admirerions ce mouvement ascensionnel et convergent vers la croix du Christ. Toute vie d'homme est une montée. Tout homme a rendez-vous avec le Christ. Chrétiens, nous le savons. Mais savons-nous aussi bien que nous sommes chargés de l'indiquer aux autres? Savons-nous montrer notre "étoile polaire"? Denis LUONG | ||