Dieu Père, Dieu Fils, Dieu Esprit

Comment vit Dieu, comment est la vie intime en Dieu ? C'est la question essentielle, puisque c'est notre vie d'aujourd'hui et de demain. Avec l'irruption de l'Esprit Saint comme Don de Dieu à la Pentecôte, les apôtres comprennent enfin ce que Jésus a dit et a fait au temps où ils vivaient et suivaient Jésus partout. On sent l'authenticité et la nouveauté de leurs témoignages dans leur doute et leur ignorance.

Leur témoignage est que jamais, personne ne parle de Dieu comme Jésus. Lui seul sait utiliser le langage humain pour parler de l'Eternel, de l'Imprononçable. Et pour cause, le Verbe de Dieu s'est fait Jésus de Nazareth. Il nous initie à la vie intime en Dieu, nous fait même entrer en Dieu, par le fait qu'il a utilisé tous les mots humains pris à partir de nos vécus, Dieu est hors de l'espace et du temps, comment " entrer, naître, demeurer " sans que nous ne soyons pas conduits par le Verbe, dans le sein du Père ?

Le langage humain est enrichi, ennobli ; chaque mot usuel est épuré de toute ambiguïté, rehaussé à la capacité de parler de la vie en Dieu. Le mot le plus important dont le sens éclaire tout le message de Jésus est le mot " Père ".

Jésus ne cesse de parler de son Père. Dans les vingt et un chapitres de St Jean, il n'y en a pas un qui ne parle pas de son Père. " Dieu a tellement aimé le monde qu'il lui a donné son Fils, son unique. " "Celui qui m'a vu, a vu le Père. " " Vous connaîtrez que je suis dans mon Père et que vous êtes en moi comme moi en vous. " " Je vous ai dit ces choses tandis que je demeurais auprès de vous. Le Paraclet, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses et vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. "

Comment parler d'une vie en quelques minutes la vie en Dieu ? Jésus l'a fait en une prière à son Père, " Notre Père qui es aux cieux ". Il l'a dit en une confidence ou en une consigne. " Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur terre. Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez les au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit. "

La relation humaine qui donne le fondement à la société, la racine à l'existence de tout un chacun, est celle qui donne la vie : La paternité et la maternité, les relations intimes que nous avons avec nos parents, avec nos enfants, la filiation. Commencés à partir des liens du sang, les liens de la "paternité maternité" et de la filiation nous emmènent au plus haut niveau spirituel : Père, Fils, Esprit. Dieu a emprunté cette expérience la plus forte pour adopter pour lui-même un nom.

Pour le sage bouddhiste, ou tout athée, considérer la suprême réalité divine comme " Dieu " qu'on utilise avec tant de légèreté en parlant de nombre, trois ou trine, c'est manqué de respect envers Celui qui n'a pas de nom. On le limite en la faisant une réalité intérieure à ce monde et soumise aux pensées des hommes.

La recherche de Dieu renvoie les chrétiens à une écoute personnelle de la parole de Jésus. Seul Jésus peut parler de Dieu et nous apprend à le dire. Nous avons le Livre dans lequel Dieu parle par ses prophètes, par son Verbe qui s'est fait chair. Mais bien d'autres n'ont pas ce Livre.

Mais Dieu a fait que le monde soit aussi un livre qui parle de Lui. Ce livre est le seul dont disposait l'humanité que nous considérons comme païenne. Cette humanité observe, regarde, écoute pour savoir comment nous parlons de Dieu, le Père de tous. Les preuves ne convainquent personne. Tous attendent plutôt des témoignages de vie, comme Jésus en témoigne : Dieu Père, Dieu Fils, Dieu Esprit.

Un professeur d'histoire à la Sorbonne a relevé que les conséquences de cette relation d'amour si forte entre le Père et le Fils, de même nature, libre et égale dans la diversité, sont incalculables et durables. Il se demande si la confession de Dieu Père, Dieu Fils, Dieu Esprit n'a pas inspiré les Droits de l'Homme. Il a trouvé que l'unité Père, Fils, Esprit de Dieu n'est pas fusion, mais l'acceptation de l'autre. C'est la base de la Déclaration de 1789 qui a laïcisé cette réalité spirituelle.

La vie est la relation en perpétuel échange. La célèbre icône d'Andreï Roublev, symbole de l'apparition de Dieu à Abraham et à Sarah sous la forme de trois anges pèlerins, parle de l'hospitalité d'Abraham. A travers cette scène biblique d'un temps reculé, l'intention du peintre est d'évoquer la présence du Dieu Père, Dieu Fils, Dieu Esprit. Le Dieu de la Bible se laisse trouver à travers les autres, comme le chemin qui mène au " Tout Autre ". Le " Tout Autre " peut être rencontré dans l'autre, les autres. L'hospitalité est pour tous, une relation sacrée. Elle reste ouverte. Elle ne se limite pas à la rencontre des deux, mais à celle qui laisse la place à bien d'autres. Entre les trois, il reste encore la place pour l'inconnu, pour l'étranger.

Denis Luong