Veillée
Pascale
Ce soir n'est pas comme les autres soirs. C'est ainsi que le grand-père
chez les enfants d'Israël commence à raconter la fête Pascale.
Pourquoi ce soir n'est-il pas comme les autres soirs, demandent les enfants ?
Et au grand-père de continuer le récit.
Ce soir, c'est la grande
nuit où, l'ange du Seigneur passe devant chaque maison pour exterminer
les premiers nés des familles d'Egypte. Egypte a refusé laisser
les enfants d'Israël partir libres. Mais devant les maisons des enfants hébreux,
il passe outre, c'est le sens de la Pâque. Car leurs portes sont marquées
du sang de l'agneau sacrifié pour la fête.
Sans s'arrêter,
le grand-père continue de raconter tous les hauts faits de Dieu pour libérer
son peuple. Chaque pays du monde a sa fête nationale. Leur liberté,
leur indépendance sont acquises par des luttes sanglantes, au bout de leurs
fusils. Mais notre fête nationale est la Pâque qui célèbre
la nuit où l'ange a épargné nos maisons. Pâque est
la fête de l'intervention de Dieu.
La veillée est le temps du
soir jusqu'à l'aurore qui va venir. Et toute la nuit est faite pour raconter
les bienfaits de Dieu. Le Grand-père raconte tout : les dix plaies dont
Dieu a frappé l'Egypte. Et comme pour dire qu'on est confus de tant de
bienfaits, il fait des suppositions :
S'il nous avait fait sortir de l'Egypte
sans châtier les Egyptiens, cela aurait été suffisant. S'il
avait divisé la mer pour nous faire passer, sans nous la faire passer à
pied sec, cela aurait été suffisant…
Notre liturgie de la Parole
est le rappel de cette veillée de Pâque du premier testament. Les
bienfaits de Dieu, il faut toute la Bible, et toute la nuit pour les raconter.
Comment pourrais-je vous dire en une minute tout ce que le grand-père raconte
à ses enfants et à ses petits enfants ? Je vais le faire avec le
magnifique résumé que sont les premières pages de la Bible
qui chantent comment Dieu a créé le monde, tout l'univers, le ciel
et la terre, et tous ceux qui y habitent, à partir du néant. Dans
ce chant de la création du monde se cache l'histoire d'Israël sauvé
par Dieu à partir de l'anéantissement qu'il a subi.
Homélie
:
Ce soir n'est pas vraiment comme les autres soirs. Ce soir veut devancer
le grand matin, comme l'évangile de St Luc vient de le raconter. Nous allons
au tombeau dès la première veillée de cette nuit pour découvrir
avant Marie Madeleine que le tombeau est vide, pour écouter l'ange qui
rappelle ce que Jésus a dit quand il était encore en Galilée
: " Il faut que le Fils de l'homme soit livré aux mains des pécheurs,
qu'il soit crucifié et que, le troisième jour, il ressuscite ".
Au lieu des aromates que les femmes ont préparés pour embaumer le
corps du Seigneur, nous sommes venus ce soir avec notre cœur plein de prières
et de chants. La partie principale de l'Exultet, le chant qui annonce la fête
a été mis en réserve pour la méditation personnelle,
mais nous pouvons servir à le dire tout haut comme l'homélie de
ce soir.
Ô nuit de vrai bonheur, toi seule peux connaître cette
heure où le Christ brisant les liens de la mort, s'est relevé victorieux
! Il a le pouvoir sanctifiant de cette nuit qui chasse les crimes et lave les
fautes, rend l'innocence aux coupables et la joie aux affligés, dissipe
la haine, dispose l'amitié et soumet toute puissance.
Ô nuit
de vrai bonheur, nuit où le ciel s'unit à la terre, où l'homme
rencontre Dieu !
Pâques a ceci de grand : C'est l'élan irrésistible
du cœur de l'homme vers la liberté. Au cœur de la faute, au cœur du désordre
causé par le mal, il y a toujours en nous l'aspiration d'échapper
à la déchéance, de passer à la vie saine. Cet élan
est plus fort que l'humiliation de l'expérience du mal. C'est ainsi que
nous pouvons tous nous retrouver dans l'expérience de la sortie d'Egypte,
de la Pâque juive.
Ressusciter c'est vivre au présent éternel.
Nous ne savons pas dire ce qu'est la présence. Le fait que nous sommes
là et que les autres soient là aussi, fait notre bonheur. Ce bonheur
est fragile. Notre peur, celle des petits comme celle des adultes n'est-elle pas
l'absence de l'autre, des autres ?
Les femmes se dirigeant vers le tombeau
au grand matin de Pâques ont voulu combler le vide dans leur cœur. Elles
vont découvrir que le mort qu'elles vont visiter est plus vivant que tous
les bourreaux, les assassins, les puissants de ce monde.
Il est juste que
le récit de la nuit pascale soit dit par les femmes. Ce sont elles qui
vont au devant du Ressuscité. Le récit de la Passion du Vendredi
Saint racontait les actions perpétrées exclusivement par les hommes.
Une histoire cruelle et sanglante. Les femmes sont appelées à dire
le message de la paix, la Bonne Nouvelle de la Résurrection. Dans leur
nature, elles en sont plus proches que nous, les hommes.
Ressusciter c'est
devenir reconnaissant pour ce cadeau inouï que représente notre vie,
renouvelée tous les jours au sein de la beauté du monde. La Pâque
Nouvelle qu'inaugure Jésus sorti du tombeau dépasse toutes nos aspirations
à la vie qui ne finit pas, qui ne tombe pas dans le néant de l'oubli.
" A quoi servirait-il de naître sans le bonheur d'être sauvé
? " demande le chant " Exultet " qui chante encore : " Que
notre aspiration à la vie pour toujours soit comme ce cierge pascal, consacré
à ton nom, Seigneur, qui brûle sans déclin dans cette nuit,
qui joigne sa clarté à celle des étoiles. Qu'il brûle
encore quand se lèvera l'astre du matin, celui qui ne connaît pas
de couchant, le Christ, ton Fils Ressuscité, répandant sur les humains
sa lumière sa paix ".
D.L.