Je propose un exemple, personnel, bien banal, un conflit familial.
Un héritage partagé à la première génération
avec déjà conflit puis à la deuxième, la
mienne, entre une sœur et son frère, mon mari, mort maintenant.
Une très vieille maison à colombages avec rivière,
prés, moulin… bref tout ce qui peut attiser le désir !
L'horreur sur deux générations et ce n'est pas fini… malheureusement.
Certes, mon mari était très généreux par
tempérament, mais aussi enclin à céder pour avoir
la paix, moi, généreuse également avec un sens
très poussé de la justice mais peut-être aussi avec
un peu trop l'orgueil de bien faire.
En tous cas, malgré nos efforts conjugués et maintes fois
recommencés en pensant : "on va y arriver, on va retrouver
la confiance réciproque et s'aimer vraiment, en frères,"
nous n'avons pas réussi.
Un de mes fils, le meilleur des hommes, me dit parfois, moitié
sérieux, moitié riant : "avec ta sale charité
chrétienne, tu nous as mis dans une drôle de panade ! On
ne peut même pas, quand il y a la canicule, aller se baigner dans
le bief autour du moulin et sur la chaussée, le seul endroit
qui n'est pas dangereux."
Pourquoi, au partage, avoir cédé sur ce point et avoir
abandonné un endroit irremplaçable, pourquoi en effet
? Ce n'est certainement pas par charité chrétienne uniquement.
Avec l'âge et l'aide de Dieu, on arrive peu à peu à
mieux se connaître vraiment. On finit par comprendre pas mal de
choses. D'abord s'il y a des gens certes beaucoup plus intéressés
et durs que d'autres dans n'importe quel conflit national, politique
ou familial il est rare que l'un des partis soit innocent à cent
pour cent et l'autre coupable au maximum.
Nous avons donc dû, mon mari et moi, le seul côté
que je connaisse, à peu près, à fond maintenant,
faire des erreurs, reculer devant certains efforts de compréhension,
devant des explications qui nous auraient fait, en affrontant autrui,
nous affronter nous-mêmes en profondeur, en pauvreté.
Bien sûr, il y a la peur toujours omniprésente dans les
conflits mais, quand on aime vraiment, il n'y a plus de peur, on avance
avec le Christ. Cela je ne l'ai pas vécu réellement, suffisamment,
sans doute. Il ne s'agit ici ni de psychanalyse, ni de masochisme. Il
s'agit d'une réflexion faite à la lumière de l'Evangile.
La correction fraternelle c'est terriblement difficile, il faut beaucoup
d'humilité et d'amour pour y arriver et pourtant c'est ce qu'on
doit faire au lieu de critiquer par derrière.
En espérant que cette demi confession-analyse, pourra servir
à moi-même et surtout à d'autres.
Geneviève MEHEUT
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