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   Le prix de la vie  
     
   Germinal n° 124  
   

          J'étais en retraite spirituelle à l'Hay-les-Roses depuis le 3 Septembre lorsque à mon retour le 11 vers 14h30, alors que je venais tout juste d'arriver, une personne amie me téléphone "ma Soeur, ouvrez votre poste de télé sur la 2 ! " C'est alors que je découvre l'horreur : la première tour en flamme, tandis que je vois arriver le deuxième avion qui va sciemment percuter sa soeur jumelle. Mes deux soeurs me rejoignent l'une après l'autre dans l'appartement et comme moi restent sidérées, pétrifiées devant le spectacle que nous donne la télé.

          Nos réflexions, nos hypothèses vont bon train : comment se fait-il que les Américains aient laissé passer des avions-pirates dans leur espace aérien ? Qui a fait cela ? Pourquoi ? Peu à peu les informations se précisent : ce ne sont pas des avions venus d'ailleurs qui ont accompli ce forfait, ce sont des Boeings de tourisme appartenant aux U.S.A. et desservant les lignes intérieures qui, sous la pression de pirates, se sont détournés de leur route et ont percuté volontairement les tours de World Trade Center, sachant très bien que non seulement les passagers mais aussi les pirates allaient mourir dans l'opération. Mais qui est à l'origine de ces attentats ?

          Stupeur, effroi, indignation, compassion pour les malheureuses victimes dont certaines, que nous voyons à la télé, essaient de fuir une mort affreuse en se jetant pas les fenêtres. Pendant ce temps le troisième avion se jette sur le Pentagone tandis qu'un 4ème s'écrase en Pensylvanie.

          Ce premier jour, nous sommes trop bouleversées pour réfléchir vraiment. La nuit, mes rêves me présentent sans cesse les tours en flammes et la foule américaine qui court, qui court. Quand les medias nous apprennent que vraisemblablement c'est Ben Laden et ses fondamentalistes musulmans qui sont les commanditaires de ce massacre minutieusement préparé depuis des mois et sans doute des années, les questions qui me hantent changent. Elles tournent autour du prix de la vie, du sens de Dieu, des excès que peut engendrer la haine.

          Quel est ce Dieu pour lequel des jeunes gens cultivés, instruits, sont prêts à sacrifier leur vie et à entraîner dans leur mort affreuse des centaines d'innocents ? Allah n'a pas prêché la haine. Le Coran non plus. Je pense à mes voisins musulmans avec qui nous entretenons les meilleurs rapports, je pense aux conférences que j'ai entendues sur l'Islam et au rapprochement islamo-chrétien que connaît notre époque.

          Les Américains prêchent la riposte et on les comprend un peu. même si on pense que la haine et la violence ne doivent pas répondre à la haine et la violence. Mais aujourd'hui, alors que depuis trois semaines, les bombes pleuvent sur l'Afghanistan et font des victimes innocentes parce qu'il est difficile de viser avec une précision chirurgicale, les questions que je me pose sont autres.

          Je souffre de réflexions qui mettent en cause Dieu dans ces événements. J'entends dire "mais comment pouvez-vous croire en Dieu devant des événements pareils ? Un Dieu qui pousse à convaincre des jeunes qu'en sacrifiant leur vie pour tuer des centaines de victimes innocentes mais occidentales, donc supposées chrétiennes, on va gagner un paradis merveilleux où on sera accueilli par des dizaines de belles jeunes filles ? Ce Dieu-là n'est évidemment pas le mien.

          Par ailleurs, il est nécessaire d'éradiquer les actions terroristes. Mais le prix de la vie, d'une seule vie et, à plus forte raison, de centaines de vie, demande autre chose que des bombes ou des missiles. Quand sera-t-on capable d'organiser le monde de telle sorte qu'il n'y ait plus un abîme entre les pays développés et les autres, entre les riches d'un même pays et ceux qui, dans le quartier voisin, ont tout juste de quoi ne pas mourir de faim.

          Ces problèmes me dépassent. J'en ai tout à fait conscience mais tout en faisant ce que je peux pour créer, autour de moi, de l'amitié, du respect, de la justice entre ceux qui me sont proches, je souffre de me sentir totalement impuissante devant de tels malheurs.

          Nous sommes dans un monde où tous les jours la publicité, les médias nous donnent une image du bonheur liée à la possession, à la consommation, à la beauté, à la jeunesse et au plaisir. Pourquoi les générations plus âgées, les nôtres, n'ont-elles pas été capables de faire vibrer les jeunes à un autre idéal ?

          Où va notre petite planète qui, après de tels événements et avec d'autres actions scientifiques, médiatiques ou politiques donne l'impression que nous sommes en train de marcher sur la tête ? Et que faire, pour combattre la haine et l'intolérance ? Est-ce que la prière, le respect mutuel, les échanges de service entre voisins suffisent ? Et que pouvons-nous faire d'autre ?

Soeur Marie-Joseph

 
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