Par cette phrase synthétique
surgie du fond de ma mémoire où elle dormait depuis
le temps lointain de mon séminaire, j'ai résumé
dimanche dernier la belle homélie de Philippe sur la parabole
de Lazare et du mauvais riche. (30.09.01 - Lc 16,19-31). Vivre l'aujourd'hui
de Dieu, l'instant présent. Puisque c'est le seul qui existe.
Le temps passé n'existe plus et demain n'existe pas encore.
C'était pour moi une manière nouvelle de lire cet
évangile de Luc qui jusqu'alors, me paraissait une invitation
au partage. Et cependant si je me mets à écrire, c'est
avec l'intention de revenir sur le passé, le passé
d'avant les grandes vacances,
Pour moi, cela commença par
un temps d'absence dans une île charmante du Morbihan : l'île
aux Moines ! 15 jours de repos avec Soeur Marie-Catherine dans une
propriété entourée d'une immense prairie peuplée
de toute une colonie de lapins sauvages dont on apercevait seulement
quelques petites queues bondissantes, le soir quand tous les bruits
s'étaient éteints. Au-delà de la prairie, la
mer ou plutôt le golfe, visible de toutes nos fenêtres.
Les vacanciers n'étant pas encore arrivés nous jouissions
là d'un calme total, d'une solitude érémitique
propres au repos et à la méditation.
Les jours d'installation passés,
je sors mon matériel à écrire et entreprends
de faire la liste de toutes les cartes que je vais envoyer. Las,
mon demi-format est bientôt achevé et il y a encore
plein de noms qui ne sont pas dessus. Et puis, est-ce que je ne
vais pas oublier quelqu'un ? Effrayée par le nombre de missives
à rédiger (sans ordinateur), de timbres à acheter,
je renonce et décide de n'écrire à personne.
Je compense en priant pour tous mes amis de Châtenay et d'ailleurs,
chaque soir, comme je le fais tous les jours, mais peut-être
un peu mieux. L'avez-vous senti ?
Excusez-moi de relater ce fait sans
importance, mais j'ai tellement reçu de cette communauté
de Saint-Germain et j'ai tant d'amitié affectueuse pour chacun
de ceux qui en sont les pierres vivantes que je ne voudrais pas
mourir sans qu'ils le sachent. Aucune raison, me direz-vous pour
que je fasse bientôt le grand saut, encore que cela peut être
tout à l'heure, ou demain ou dans ...x... années.
Alors je profite des colonnes de Germinal pour dire à tous
mon très grand merci.
De retour le 21 juin, je peux assister
le 24 à la fête d'adieux organisée en l'honneur
de Pascal et Yvette. C'est vivant, sympahique et très bien.
Mais Dieu qu'il fait chaud ! Malgré les coins d'ombre que
j'ai pu trouver et la sollicitude de plusieurs paroissiens envers
la vieille dame que je suis, je n'échapperai pas au coup
de chaleur qui se manifestera dès le lendemain par une sinusite
virulente.
A partir du 14 juillet, c'est le grand
calme et presque le vide lors des messes paroissiales. La ville
aussi est assoupie. Les magasins sont presque tous fermés.
Passants et voitures se font rares. Les chantiers eux-mêmes
sont endormis. Le Centre Paroissial que je fréquente peu
à cause de mes mauvaises jambes, est d'un calme plat. Seuls
le bar et la sacristie sont un peu vivants, un peu et parfois beaucoup,
à cause des ouvriers qui y travaillent. Certains sont des
paroissiens bénévoles dont j'admire l'adresse et le
dévouement.
Grâce à eux, la sacristie
s'honore maintenant d'un point d'eau, poste rêvé depuis
des décennies par les décoratrices(eurs) qui se sont
occupés de fleurir notre église. Les vieux placards
ont pris un coup de neuf et, rajeunis, ont changé de place.
Quant à la sono, toute neuve, je ne me lasse pas de l'admirer
mais, je ne sais plus m'en servir et il me faut l'aide d'un spécialiste
pour enregistrer les conférences.
Le week-end de rentrée va me
donner l'occasion de le faire et nous aurons la joie non seulement
d'entendre mais aussi de lire (quand il m'aura renvoyé le
brouillon) le texte passionnant de Luc Pareydt sur "Demain
l'Eglise, vivre ou survivre."
Ce même jour, 7 octobre, au
cours de la messe de 11 h, Philippe présente à la
paroisse Frédéric et Claire Boudier, le nouveau foyer
d'accueil et les envoie en mission. Enfin après l'Eucharistie
un sympathique verre de l'amitié permet aux uns et aux autres
des échanges fraternels, échanges suivis pour ceux
qui le peuvent par un déjeuner pique-nique au Centre.
L'après-midi, Pierre Maillot
nous passe au Centre un film que j'ai beaucoup aimé "Voyage
à Tokyo". Affligée d'une véritable infirmité
en ce qui concerne la musique, je n'avais pas su comme certains
apprécier toutes les richesses de "l'Autre Vie",
mais "Voyage à Tokyo" m'a beaucoup émue.
Est-ce parce que moi-même, je prends de l'âge ou parce
qu'il m'est donné de visiter des personnes âgées
dont certaines sont très abandonnées, je suis particulièrement
sensible à cette carence de notre société qui
n'a que trop tendance à marginaliser les personnes âgées
et à oublier tout ce que les parents ont fait pour leurs
enfants lorsque ceux-ci étaient jeunes.
Notre époque coupe l'humanité
en tranches : il y a les enfants qui sont souvent traités
comme des petits rois à moins qu'ils ne soient l'objet de
maltraitances, il y a les jeunes, il y a les "quadras"
et dans la même catégorie les "quinquas",
catégorie des actifs mais qui n'ont pas toujours hélas
la sécurité de l'emploi, et puis au-delà, il
y a les jeunes retraités qui, si leur santé et le
montant de leur retraite le leur permet, voyagent et font le bonheur
des différentes agences de voyage. Ce sont aussi ceux auxquels
on demande le plus dans l'Eglise parce qu'ils ont du temps.
Et enfin viennent les aînés,
ceux qui n'en peuvent plus et auxquels on ne demande plus rien à
moins qu'on ne les exploite pour la garde des petits enfants, souvent
épuisante pour eux. Comme c'est triste de rencontrer de ces
octogénaires relégués dans une maison de retraite
qui peut être un palace, mais où manque l'essentiel,
la chaleur de l'affection ainsi que des raisons de vivre et qui
vous disent "Ma famille, ma Soeur, elle ne s'occupe pas de
moi, je serai intéressante pour eux le jour de ma mort. Là
ils sauront rappliquer pour se partager l'héritage ! Aujourdhui,
je suis sans intérêt pour eux. Comme je voudrais mourir
maintenant que chaque matin je me demande à quoi je peux
bien servir !"
Mes visites au Séquoïa
et mon nouvel habitat où les résidents sont des gens
simples aux revenus très modestes m'ont fait toucher du doigt
que ces gens simples aux petites ressources ont beaucoup plus de
coeur que les familles très riches des grands mères
que je visite au Séquoïa. Les personnes âgées
de mon immeuble reçoivent tous les jours la visite de l'un
ou l'autre de leurs enfants.
J'aurais aimé qu'à propos
du beau film "Voyage à Tokyo" soit abordée
cette question plus grave pour moi et plus importante que les aspects
techniques du film. Quoi qu'il en soit merci à Pierre Maillot
qui nous a permis d'admirer une belle oeuvre !
Et maintenant que toutes les activités
de la paroisse ont repris, il nous reste à tous à
mettre en oeuvre imagination, courage et dévouement pour
que notre paroisse et l'Eglise "vivent et non survivent".
Il nous reste aussi à manger "le pain d'aujourd'hui",
au jour le jour, sans nostalgie sur celui d'hier et sans vivre à
l'avance le goût de celui de demain. Merci, Philippe pour
cette homélie si riche !
Soeur Marie-Joseph