C 'est l'invitation de Dieu à
son Peuple, que nous rappelle le Deutéronome.
C'est aussi le thème de la conférence
de Luc PAREYDT lors du week-end de rentrée en octobre 2001.
Il avait intitulé son intervention " Vivre ou survivre
", le " survivre " étant du côté
de la mort, malgré les apparences contraires.
Ce numéro de Germinal voulait
recueillir vos réactions sur la réflexion de Luc PAREYDT.
Je remercie les courageux qui ont pris la plume.
Pour ceux qui n'ont pas entendu la conférence
ou ceux qui n'ont pas pris le temps de la lire, je vais tenter à
leur intention de me livrer à l'exercice auquel on soumet les
élèves de classes préparatoires : la contraction
de texte (je ne suis pas sûr que j'obtiendrais la moyenne).
Plus simplement, je vais faire un résumé qui reprendra
les propositions essentielles de son intervention.
1 - Vivre, c'est inventer. Vivre,
c'est aller son chemin dans l'aléatoire. On ne sait pas très
bien ce qu'on va trouver, mais enfin, il y a de l'optimisme, il y
a l'espérance, il y a l'avenir…
Ca va mal, donc, plus que jamais,
il faut inventer… Ne pas lâcher le dynamisme fondamental de
notre tradition… Notre tradition, c'est de réinventer sans
cesse…
Par rapport à tout cela des tentations
et des pièges nous guettent :
- Première tentation : le piège
du " rétroviseur "… pas de piège de la nostalgie,
regardons en avant.
- Deuxième piège… le piège
de l'accélérateur : cela consiste à dire, "
on verra bien, de toutes façons l'espérance est devant
nous ". Cela manque de réalisme, parce que cela ignore
la situation dans laquelle nous vivions.
- Troisième piège : l'indifférence…
c'est le piège gérontologique par excellence… Il n'y
a plus rien à faire…
2 - Dans les inventivités que
nous allons avoir pour l'avenir, ne regardons pas notre nombril, mais
regardons autour de nous ; ouvrons nous à la société
qui est autour de nous pour voir s'il n'y aurait pas des partenaires
avec lesquels nous pourrions féconder ensemble des réponses
adaptées aux temps nouveaux qui se présentent…
Ce qui sera la brillance, la vigueur,
le témoignage de l'Eglise aujourd'hui et demain dans notre
monde, c'est notre foi.
Notre société, notre culture
et notamment les plus jeunes nous attendent, mais pas de n'importe
quelle manière. Ils nous attendent… sur trois choses :
Ils attendent… " des hommes et
des femmes qui aident à répondre à trois questions
:
. D'où est-ce que je viens ?
· Où est-ce que je suis ?
· Où est-ce que je vais ?
Nous, chrétiens, nous ne savons
plus très bien qui nous sommes ensemble.
Qu'est-ce qui nous unit ? Pourquoi est-ce
que nous voulons croire aujourd'hui ? Pourquoi est-ce l'essentiel
de notre vie ?
… Une façon d'être, de
vivre, d'agir, de célébrer qui soit un appel… Venez
voir qui nous sommes, non pas parce que nous sommes les meilleurs,
mais parce que nous avons envie de vous faire goûter ce qui
nous fait vivre.
3 - Trois éléments
de notre Tradition qui paraissent plus particulièrement d'actualité
:
Nous sommes invités à
être " les témoins de la mémoire ".
Pour nous, chrétiens, l'espérance,
c'est risquer l'avenir en s'appuyant sur le passé, aujourd'hui.
C'est très fondamental pour beaucoup de gens aujourd'hui. Parce
que nous, nous croyons depuis longtemps que Dieu s'est fait homme
pour le salut du monde ; et aujourd'hui, nous tenons cette conviction
à la face du monde et de façon concrète pour
éviter que la mort l'emporte. Et nous voulons tenir parole
demain, quoi qu'il arrive dans l'Histoire, pour être présents
à ce monde-là et aider les souffrances, les blessures
etc… Tout le monde attend des témoins de paix, des témoins
d'espérance.
Nous sommes invités à
être les " témoins de la Loi " (avec
un grand L)… La Loi dans la tradition chrétienne, c'est le
contraire de la peur, c'est la liberté. Pourquoi le Christ
est-il venu apporter, confirmer, accomplir la Loi ? C'est pour que
désormais nous soyons libres.
Nous ne sommes pas des communautés
qui doivent apporter une parole bien gentille. Nous sommes des communautés
qui doivent dire " oui " quand il faut dire " oui ",
" non " quand il faut dire " non ", dans l'espace
public, dans nos communes, dans nos pays, dans le monde. Et que ce
" oui " soit " oui " et que ce " non "
soit " non ". Il y a des injustices à dénoncer.
Nous avons des ressources qu'il faut
particulièrement soigner au cœur de notre Tradition parce qu'elles
sont singulièrement contemporaines et adaptées aux demandes
de notre temps.
Le monde attend des " gens qu'ils
aient un projet ".
Nous sommes contemporains de cette société,
nous partageons ses angoisses, nous avons ses mêmes questions…
Nous sommes en projet avec eux pour relever le défi avec notre
identité propre parmi et avec celles des autres.
Je crois en l'Evangile de la rencontre
et la rencontre se fonde pour moi sur cette image de l'Evangile à
Césarée de Philippe : "Qui dites-vous que je suis
? Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ".
… Des tas de gens aujourd'hui… Ont soif
qu'on leur pose cette question : Toi, en qui crois-tu ? Crois-tu en
toi ? Crois-tu dans le monde ? Crois-tu dans la vie, crois-tu en Dieu ?
Nos communautés ne peuvent-elles par être d'abord et
fondamentalement, au nom de l'Evangile, des espaces de rencontre ?…
Des lieux où l'on puisse converser ?
Nous sommes invités à
être les " témoins de l'Incarnation ".
" Nous sommes une tradition de
l'Incarnation "… Le Verbe s'est fait chair et il a habité
parmi nous. Il s'est fait chair, il ne s'est pas fait ange… Cela veut
dire qu'aujourd'hui, Il peut parler à beaucoup de gens, y compris
hors des frontières de l'Eglise.
Dans un monde où les repères
de la sexualité, de l'affectivité, de la corporéité
sont loin d'être clairs, nous sommes les témoins d'une
religion de l'Incarnation ".
Je n'ai voulu ici que vous mettre l'eau
à la bouche et vous inviter à faire une lecture complète
de la parole pleine de souffle et d'espérance de Luc Pareydt.
André BLANC-LAPIERRE qui nous
a quittés peu avant Noël et à qui certain d'entre
nous rendent hommage, était présent à notre week-end
de rentrée, prenant sans doute des notes comme souvent.
Je n'ai pas eu l'occasion de m'entretenir
avec lui de ses réactions à cette conférence
; mais il ne fait pas de doute que les propos de Luc Pareydt aient
eu, chez lui, si soucieux de la transmission de la Bonne Nouvelle
auprès de ses petits enfants, un écho favorable.
Il ne fait pas de doute pour moi qu'il
a choisi la Vie.
Qu'en ce temps de préparation
à Pâques sur le chemin de Jésus, chacun d'entre
nous entende cet appel à choisir la Vie et y réponde.
Philippe GUIBARD, curé.