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   Jacqueline  
     
   Germinal n° 128, novembre 2002  
   

 

Vous nous avez quittés le premier jour de l'été, après 8 mois d'une longue maladie et 6 semaines d'hospitalisation à la maison médicalisée Jeanne Garnier. Vous saviez que cette maison serait votre dernière demeure. Pierre était près de vous et nous étions heureux de nous y retrouver. Je peux dire que nous y avons passé, aussi, de bons moments.

Pour votre grand départ, vous avez attendu que nous soyons tous réunis autour de vous. Ce fut pour nous un grand réconfort de pouvoir vous accompagner jusqu'à la fin.

Cela fera bientôt 5 mois que vous nous avez quittés. Vous êtes, bien sûr, encore très présente dans nos cœurs mais tout ce qui nous rappelle votre présence nous rappelle aussi votre absence et parfois cela fait très mal... Nous devons apprendre à vivre sans vous, à vivre autrement...

Je voudrais vous remercier, Jacqueline, en mon nom et aussi au nom de tous ceux qui vous aiment, pour ce que vous étiez et pour ce que vous nous avez apporté.

Vous viviez intensément le présent. Du passé, vous ne gardiez que les bonnes choses. Vous aviez cette capacité étonnante " d'oublier " ce qui vous avait fait souffrir. Pour vous, " pardonner" semblait facile ! Vous n'entreteniez pas de rancune. Vous aimiez tellement les réconciliations. Il était difficile de ne pas se réconcilier avec vous si cela était nécessaire.

L'avenir ne vous faisait pas peur car vous aviez confiance en Celui qui vous habitait. Chaque matin vous vous nourrissiez de sa Parole et cette Parole vous faisait vivre. Cela se voyait ! Une phrase suffisait et vous comblait pour la journée. Souvent vous l'écriviez et nous pouvions alors en profiter. On en retrouvait un peu partout dans la maison : vous nous les offriez comme ce que vous aviez de plus précieux !

Vous avez établi entre Dieu et vous une réelle intimité. Vous ne le quittiez pas, Il ne vous quittait pas. Vous comptiez sur Lui et on peut dire qu'il comptait sur vous aussi : vous étiez toujours prête à défendre les plus pauvres, les plus petits, ceux qui souffrent. Vous aviez le don de pleurer avec ceux qui pleurent et de vous réjouir avec ceux qui sont dans la joie.

Lorsque vous rencontriez une famille en deuil (pour la préparation des obsèques) vous la portiez dans votre cœur d'une façon telle que vous étiez alors incapable de faire autre chose, le reste ne vous souciait plus et Pierre veillait à la bonne marche de la maison.

Vous aimiez les rencontres, les vraies rencontres, celles où l'on partage ce qui nous fait vivre. Vous aimiez les choses simples : la nature, les promenades, les repas de famille, les photos... Vous étiez capable de vous émerveiller des heures devant une fleur de votre jardin à Montagnac. Votre richesse ? C'était Pierre, bien sûr, et aussi votre famille et tous vos amis. Vous étiez heureuse de ce que vous aviez et vous ne regrettiez pas ce que vous n'aviez pas. Je me suis souvent dit que c'est sans doute l'un des secrets du bonheur.

Votre sensibilité, votre qualité d'écoute, votre indulgence, votre capacité à voir toujours en nous ce qu'il y avait de meilleur faisait que nous n'avions pas de difficulté à vous confier nos soucis et nous savions que vous alliez les porter dans votre prière. C'était précieux.

Mais le maladie est entrée dans votre vie..., dans notre vie... Petit à petit il a fallu se rendre à l'évidence : le traitement n'apportait pas l'amélioration espérée. L'espoir a laissé place au doute puis à la dure réalité... Jour après jour, vous avez dû accepter de voir vos forces diminuer : ne plus lire, ne plus écrire... Ce fut un combat très difficile pour vous d'abord, pour Pierre et aussi pour tous ceux qui vous entouraient.

Mais le combat le plus difficile que vous avez dû affronter fut votre combat intérieur. Plus que la maladie vous craigniez de douter. Comment être sûr de croire jusqu'au bout en Celui en qui on a mis tout sa confiance ? Lorsque les forces s'en vont, est-il possible de continuer à penser que l'on ne s'est pas tromper ? Est-il possible d'accepter quelque chose que l'on ne comprend pas sans se révolter, sans avoir le sentiment d'avoir été trahie ?

N'était-ce pas le Seigneur qui marchait à vos côtés durant toutes ces années ? Ce compagnon de toute une vie peut-il vous oublier du moment même où vous alliez vers Lui ? Dans le doute vous avez continué à prier, vous avez même retrouvé votre sérénité et votre sourire. Non, Il ne vous a pas oublié, Jacqueline, et ce combat intérieur, lui, vous l'avez gagné.

Pierre vous a beaucoup aidée ; il a été formidable, vous le disiez. Il y avait aussi tous vos amis... et jusqu'à la fin, tant que vous avez pu prononcer quelques mots, vous nous disiez " on a de la chance " . Pour prononcer cette phrase dans des moments si difficiles, je me dis que aviez raison de croire que le Christ ne vous abandonnerait pas. Vraiment, Il vous habitait et votre cœur était tout brûlant d'amour lorsque vous nous parliez de Lui.

Hier, c'était la Toussaint. Bonne fête, Jacqueline.

Anne RICHARD

 

*J'ai eu triste privilège de pouvoir écrire à quelques mois d'intervalles une dernière lettre à mon père et aussi une dernière lettre à ma belle-mère.

 
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