retour à la page d'accueil retour à la page d'accueil
retour à la page d'accueilarchives des homéliespetit germinal, informations pratiquesla vie de la communautédernières conférencesparticipez à germinal
retour page accueil Archives Forum Au sommaire du prochain numéro
 
Consulter et participer au forum Germinal

Forum Germinal

 
   Commandement de Dieu et tradition des hommes  
     
   Germinal n° 128, novembre 2002  
   

 

     Cette livraison de Germinal est consacrée aux catholiques, mariés religieusement, divorcés et remariés civilement.

     Ce n'est pas là une situation exceptionnelle. Malheureusement on connaît des divorcés dans de très nombreuses familles. C'est pourquoi je m'interroge sur le petit nombre d'articles que nous avons reçus sur ce sujet. Peut-être faut-il interpréter cette réserve, comme la gêne pour certains de révéler aux lecteurs qu'ils sont confrontés dans leur propre famille à la réalité du divorce et du remariage.

     Au printemps dernier, j'avais organisé une réunion pour les séparés, divorcés et divorcés remariés. Seules quatre personnes étaient présentes et une cinquième, intéressée, avait fait part de son indisponibilité. Ca n'a donc pas été, au niveau du nombre, un succès. J'ai dû mal m'y prendre. Vos conseils, pour renouveler l'expérience., seront les bienvenus. Vous pourrez soit m'écrire vos suggestions, soit m'en faire part de vive voix.

    Pour cette année 2002/2003, nous avons donc programmé une nouvelle réunion sur le même sujet ainsi qu'une autre qui s'adresserait plus particulièrement aux parents qui vivent le divorce, d'un enfant. Nous savons combien cela les " remue ".

     Nous n'avons pas la prétention de "refaire" l'Eglise, mais de progresser à la fois dans la compréhension de la valeur de l'engagement pour toujours, dans le sacrement de mariage (l'indissolubilité), et dans celle d'une vie chrétienne, nourrie par les sacrements, pour ceux qui ont connu l'échec de leur vie de couple et qui se sont remariés, après un premier mariage célébré chrétiennement.

     Dans un article paru dans le journal La Vie, le 30 novembre 2000 n°2883, le Père Jean-Charles THOMAS, alors évêque de Versailles pour les Yvelines, rappelait :
" Dans l'Evangile, le Christ dit deux choses. II rappelle d'abord un principe absolu : celui de la durée et de la stabilité de tout amour conjugal, réellement conclu devant Dieu.

Avec l'Eglise romaine, je suis convaincu que ce rappel est indispensable et constructif pour la société. Non seulement par fidélité à la Parole de Dieu, mais aussi face à une situation sociale qui se dégrade : 40% des unions aboutissent à un divorce.
En second lieu, le Christ a toujours vécu la proximité, la compréhension, l'invitation à ne pas rester dans une situation qui blesse les personnes…
Cette double attitude doit nous guider dans la recherche à mener aujourd'hui…. "

     Il y a donc un travail à faire, une recherche à mener, d'abord pour comprendre la valeur et l'exigence de l'engagement stable - " un amour durable " aurait dit Jacques de Bourbon-Busset. -

     Où, aujourd'hui, cette réflexion est-elle menée ? Sans doute au cours de la préparation à la célébration religieuse du mariage pour les chrétiens catholiques. Mais est-ce suffisant ?

     Lors de leur dernière Assemblée plénière à Lourdes, au début de ce mois de novembre 2002, les évêques de France ont étudié la pastorale du mariage et ont rappelé parmi 6 conditions pour que puisse être célébré le sacrement de mariage que "l'homme et la femme s'engagent définitivement l'un envers l'autre (indissolubilité)".

    " La vie conjugale et familiale peut connaître des difficultés, voire des crises. Aujourd'hui, beaucoup ne voient pas d'autres solutions que le divorce trop souvent présenté comme une issue pacifique. On est frappé de la rapidité avec laquelle une rupture est décidée et du peu de moyens de réflexion dont disposent les personnes confrontées à cette épreuve. "

     Et j'ai trouvé particulièrement intéressante la proposition suivante que nous font nos évêques : " La préparation au mariage doit envisager ces hypothèses très clairement et pousser les conjoints à identifier les personnes qui pourraient les aider en cas de besoin, à les choisir éventuellement comme témoins de_ leur mariage. On veillera, de même, à leur fournir des informations précises et utilisables sur les mouvements familiaux ou les groupes de foyers…. "

     Rappeler les principes, l'Eglise sait le faire. C'est indispensable, mais ce n'est pas suffisant. Nous ne sommes pas une Eglise de "purs". Notre foi nous invite à tenir compte des réalités et des situations concrètes. Que faisons-nous par rapport au refus de notre Eglise d'admettre les divorcés remariés qui le désirent profondément, à la communion eucharistique ?

     Faut-il ignorer purement et simplement cette prise de position de l'autorité romaine ? Un tel comportement me paraîtrait manquer de prudence et de sens spirituel.

     Faut-il, par solidarité avec eux, faire !a grève de la communion eucharistique ? C'est la façon que certains, ont trouvé de partager la souffrance de "l'exclu".

     Faut-il quitter cette Eglise lorsqu'elle nous paraît inhumaine, sans miséricorde et aller voir ailleurs ? Et qui aidera alors notre Eglise à bouger et à réfléchir à la façon dont elle interprète le message inamissible de Jésus le Christ ?

     " Tout divorce implique des souffrances. Nous ne jugeons pas celles et ceux qui y ont recours ou qui y sont contraints, " nous disent encore les évêques de France.

     " Par fidélité au caractère unique et définitif de leur mariage, certaines personnes divorcées choisissent de ne pas se remarier. Nous reconnaissons la grandeur de ce choix conforme à l'appel de I'Evangile.

     D'autres décident de contracter une nouvelle union civile. Certaines veulent être accompagnées par la prière de l'Eglise dont elles sont et demeurent membres. Une telle prière ne peut pas prendre la forme d'une célébration, laquelle présenterait les signes extérieurs d'un mariage sacramentel.

     Par respect de la cohérence entre les deux sacrements de l'Alliance, l'eucharistie et le mariage, l'Eglise leur propose différents modes de participation à sa vie ainsi que des moyens d'accompagnement pour un cheminement spirituel."

     Je partage totalement le point de vue de Michel Legrain, professeur à l'Institut Catholique de Paris, dans le numéro de La Vie déjà cité : " … Est-ce vraiment témoigner de l'Evangile que d'écarter à vie de la table eucharistique ces personnes civilement remariées ? Et ceci jusqu'à ce qu'eIles entrent en repentance, c'est à dire, selon la discipline romaine, soit se séparent, soit s'engagent à vivre comme frère et cœur.
Les autres Eglises chrétiennes qui, elles aussi, ont reçu la grâce et la mission d'interpréter les Ecritures, ont tiré de celles-ci des doctrines et des disciplines très différentes, offrant aux personnes désireuses de se remarier des chemins de repentance plus diversifiés et nuancés.

     S'efforcer de témoigner d'un Dieu qui n'en finit pas de renouveler son alliance avec notre humanité faible et versatile, est-ce donc trahir Dieu ? (c'est moi qui souligne)… Comment oublier en effet combien sa rigidité (celle de l'Eglise) doctrinale et disciplinaire a blessé et culpabilisé pour toujours des centaines de milliers de catholiques remariés civilement après divorce. Parmi eux, beaucoup reconnaissent qu'ils ont manqué de clairvoyance, de courage ou de générosité au cours de leur précédente union. A la suite d'un travail de deuil et d'un approfondissement psycho-affectif personnel, accompagnés parfois d'une renaissance spirituelle indiscutable, des femmes et les hommes catholiques se sont mariés à nouveau, espérant que les moyens qu'ils mettent en oeuvre désormais aboutiront à une vie de couple heureuse et satisfaisante, humainement et chrétiennement. Est-ce là un péché irrémissible et impardonnable ?

     De très nombreux synodes diocésains, des prêtres, des laïcs aux responsabilités ecclésiales fort diverses demandent respectueusement et fermement que l'Eglise qu'ils aiment et servent, se décide enfin à réexaminer ses positions à la lumière d'un Evangile qui n'en finit pas, au nom de l'amour comme de la miséricorde, d'inviter autour de la table du Père de famille aussi bien le fils aîné qui se dit en règle que le fils cadet qui s'efforce de se remettre en route".

    Que cette réflexion de Germinal invite chaque membre de notre communauté à s'interroger à la fois sur la manière dont il promeut dans ses relations conjugales ou dans l'éducation de ses enfants, un amour durable à l'image de celui que Jésus le Christ a pour son Eglise et à la fois sur l'accueil qu'il est prêt à faire à la sœur ou au frère blessé et qui se sentent rejetés par l'Eglise, parce qu'exclus de la communion eucharistique. Car, ne l'oublions pas, nous sommes aussi l'Eglise, certes pas seul, mais nous sommes aussi l'Eglise.


Philippe GUIBARD, curé

 
  Envoyer sa contribution à Germinal            Consulter ou participer au forum